Legs et Donations 2023

Pour le reliquat manquant, soit 133,33, Nicolas les prélève sur les biens existants. Il reste alors 466,7 (600 – 133,3) de biens existants. Aucune action en réduction ne peut dès lors être exercée. Il est nécessaire ensuite de déterminer les droits légaux du conjoint survivant avant de répartir le reliquat des biens existants entre les enfants. En application de l’article 758-5 du Code civil, il y a lieu de distinguer entre masse de calcul et masse d’exercice. La masse de calcul comprend les biens existants ainsi que les avances sur part successorale, y compris, à notre avis, les lots de la donation-partage5. Elle correspond ici à un total de 3 400. Les droits théoriques du conjoint survivant correspondent alors à un quart de cette masse, soit 850. Quant à la masse d’exercice, pour l’obtenir, il faut déduire de la masse de calcul (3 400) la réserve (2 666,6) ainsi que la fraction des avancements de part s’étant imputée sur la quotité disponible. En l’espèce, tel est le cas du lot reçu par Mathilde qui excède sa part de réserve de 266,7 (1 600 – 1 333,3). La masse d’exercice est alors égale à 3 400 – 2 666,6 – 266,7 = 466,7. Les droits du conjoint sont donc de 466,7, soit le montant le plus faible entre ses droits théoriques et la masse d’exercice, ce qui correspond au reliquat des biens existants, une fois attribués ceux nécessaires pour compléter la part de réserve de Nicolas. S’agissant ensuite de l’usufruit sur les biens existants, donc lorsque le conjoint survivant est en concours uniquement avec des enfants communs, cet usufruit s’exerce sur tous les biens existants, y compris ceux composant la part de réserve des enfants. Ainsi, les enfants non allotis de leur part de réserve en tout ou en partie par la donation-partage ou par une donation en avancement de part ne peuvent plus prétendre qu’à une réserve en nue-propriété. Il convient ici aussi de compléter la réserve en nue-propriété des enfants au moyen des biens existants, l’usufruit de ces derniers revenant au conjoint survivant. EXEMPLE  Le de cujus laisse deux enfants : Nicolas et Mathilde ainsi que son conjoint survivant.Il aconsenti unedonationhorspart successorale à Mathilde d’une valeur de 600 en 2010 et une donation à Nicolas d’une valeur de 400 en 2015. Une donation-partage est intervenue en 2018 attribuant à Nicolas 800 et à Mathilde 1 600. Il reste 600 en biens existants. Le conjoint survivant opte pour l’exercice de son usufruit sur les biens existants. La masse de calcul de la quotité disponible est égale à 4 000, la part de réserve de chacun est de 1 333,3 et la quotité disponible de 1 333,3 également. Il y a lieu de vérifier que chaque enfant a reçu sa part de réserve, sachant que pour la part de réserve non totalement attribuée, celle-ci n’est plus qu’en nue-propriété compte tenu du choix fait par le conjoint survivant. Mathilde a reçu 1 600 au titre de la donation-partage. Elle a donc reçu sa part de réserve. Nicolas n’a reçu que 800 dans la donation-partage mais avait 5 En ce sens également : C. Lesbats, La dévolution successorale : LexisNexis, 2020, n° 824. 6 Dalloz Action Droit patrimonial de la famille 2021, n° 413.36. bénéficié d’une donation en avancement de part de 400. L’indemnité de rapport sert alors à composer sa part de réserve. Pour le reliquat manquant, soit 133,33 en nue-propriété, Nicolas les prélève sur les biens existants. Il reste alors 600 – 133,3 = 466,7 en nue-propriété et 600 en usufruit de biens existants. Aucune action en réduction ne peut dès lors être exercée. Il est nécessaire ensuite de déterminer les droits légaux du conjoint survivant avant de répartir le reliquat des biens existants entre les enfants. En application de l’article 757 du Code civil, le conjoint survivant recueille la totalité de l’usufruit des biens existants. La nue-propriété desdits biens doit ensuite être répartie entre les enfants, déduction faite de ce qui a été utilisé pour compléter la part de réserve de Nicolas. C’est donc 466,7 en nue-propriété qui sont répartis de façon égale entre Nicolas et Mathilde. On constate que Nicolas subit davantage l’usufruit du conjoint survivant que Mathilde, cette dernière ayant été davantage gratifiée que son frère. 2. Un partage, en principe, égal des biens existants 7 - Présentation et justification du mécanisme. – Alors que la méthode exposée ci-dessus conduit à retenir que l’article 1077-1 impose que l’héritier n’ayant pas reçu sa réserve se voit attribuer prioritairement les biens existants pour obtenir ou compléter sa part de réserve, le restant de biens existants devant seulement ensuite être réparti suivant la dévolution ab intestat, la seconde méthode aboutit à répartir les biens existants suivant la dévolution ab intestat dans un premier temps. L’inégalité créée par la donation-partage entre les enfants peut alors être parfois maintenue. Pour Michel Grimaldi, cela est parfaitement justifié puisqu’« une donation-partage peut créer une inégalité dans la dévolution successorale, pourvu qu’elle ne porte pas atteinte à la part de réserve de chacun des enfants. L’inégalité qui procède de la volonté du de cujus ne doit donc être corrigée que dans la mesure nécessaire pour que chacun des enfants reçoive sa réserve, et non par principe : l’enfant qui a reçu un lot moins important que les autres peut bien, au décès, exiger d’être pourvu de sa réserve ; il ne saurait prétendre à un rétablissement d’une complète égalité »6. C’est seulement donc, dans un deuxième temps, si cette répartition ne conduit pas à attribuer à chaque enfant sa part de réserve qu’il convient de déroger à la dévolution ab intestat et de revenir à la première méthode. 8 - Modalités de mise en œuvre. – Cette seconde méthode comprend également trois étapes : – première étape : la prise en considération des biens reçus par voie de libéralités en avancement de part puis les lots de la donation-partage et enfin les biens existants non légués, après partage suivant les règles de la dévolution légale ; – deuxième étape : il y a lieu de comparer le résultat obtenu avec les droits à réserve. Si chaque enfant a reçu sa part de réserve, la répartition des biens existants n’est pas modifiée. Si chaque enfant n’a pas reçu sa part de réserve, il faut alors passer à la troisième étape ; – troisième étape : elle consiste à appliquer la méthode reconnaissant un - 44 - LE GUIDE DES ASSOCIATIONS & FONDATIONS 2023 ÉTUDE FAMILLE

RkJQdWJsaXNoZXIy MTQxNjY=