Legs et Donations 2023

A - Le traitement successoral des libéralités-partages 20 - Nous avons vu que les libéralités-partages relèvent de la loi successorale anticipée et s’apprécie au moment où elles sont effectuées. 21 - Loi applicable. – Le traitement successoral relève de la loi successorale, c’est-à-dire en principe de la loi de la dernière résidence habituelle au moment du défunt du de cujus. Ainsi, c’est la loi successorale qui indiquera si la donation est rapportable, si elle doit faire l’objet d’une réduction…16 Ainsi, les règles de faveur prévue par la loi française dans le traitement successoral d’une donation-partage (absence de rapport successoral, maintien des valeurs au jour de la donation pour le calcul des réserves héréditaires) ne relève pas de la loi applicable à la libéralité-partage mais la loi successorale17. « Chaque donation-partage doit donc avant signature donner lieu à deux niveaux d’analyse : d’abord, déterminer les lois qui vont la rendre efficace ; puis, articuler les lois applicables à la donation-partage et à la succession afin de sécuriser les attentes des parties »18. 22 - Première difficulté : discordance entre la loi applicable à la succession et celle de la libéralité-partage. – En outre, la loi applicable à la libéralité-partage ne sera pas forcément la même que celle applicable à la succession puisque le moment d’appréciation n’est pas le même. La résidence habituelle s’apprécie au moment de la libéralité alors que pour la succession elle s’apprécie au moment du décès. Cette discordance entre les deux lois peut fragiliser les effets de la libéralité partage. En effet, en cas de changement de résidence de l’auteur de la libéralité, la loi applicable à la libéralité-partage ne correspondra pas à la loi applicable à la succession. Si la loi successorale ne connait pas de la libéralité-partage elle ne produira pas les effets escomptés. Aussi, le praticien cherchera à faire coïncider la loi successorale et la loi applicable à la libéralité-partage, afin de s’assurer de la cohérence du traitement global de la transmission voulue par le futur défunt19. REMARQUE  C’est par l’intermédiaire de la professio juris que la loi applicable à la libéralité partage et celle applicable à la succession coïncideront. Le choix de la loi nationale permettra donc une identité de la loi successorale anticipée et de la loi successorale. Il n’est en effet guère aisé de changer de nationalité, en tout cas moins que de changer de résidence. Dans l’hypothèse où l’auteur acquiert une nouvelle nationalité, sans perdre celle qui a fait l’objet de la professio juris, le choix reste valable. En effet, l’article 22-1, alinéa 2 du règlement prévoit qu’en cas de double nationalité, il peut être choisi une des lois nationales. 16 H. Peroz et E. Fongaro, Droit international privé patrimonial de la famille : LexisNexis, 2e éd., 2017, n° 876 et s. 17 A. Guichard, La donation-partage en droit international privé : de l’ABC à l’art d’articuler : de l’ABC à l’art d’articuler : AJ famille 2022, p. 31, n° 1.3. 18 A. Guichard, La donation-partage en droit international privé : de l’ABC à l’art d’articuler : de l’ABC à l’art d’articuler : AJ famille 2022, p. 31. 19 A. Guichard, La donation-partage en droit international privé : de l’ABC à l’art d’articuler : AJ famille 2022, p. 31, n° 2.1. – V. aussi, B. Savouré, La planification confrontée à la mobilité des personnes : – le rapport des donations dans un contexte international : JCP N 2014, n° 18, 1181, n° 11. 20 R. Crône et L. Perreau-Saussine, Les donations-partages : aspects de droit international privé : JCPN 2019, n° 47, 1311, n° 35. 21 Pour une liste complète, H. Peroz et E. Fongaro, Droit international privé patrimonial de la famille : LexisNexis, 2e éd., 2017, n° 1133. 22 H. Péroz et E. Fongaro, Droit international privé patrimonial de la famille : LexisNexis, 2e éd., 2017, n° 1144. 23 H. Péroz et E. Fongaro, Droit international privé patrimonial de la famille : LexisNexis, 2e éd., 2017, n° 1157 et s. 23 - Seconde difficulté : donations-partages transgénérationnelles. – Enfin, il nous faut soulever une autre difficulté concernant les donations-partages transgénérationnelles. Comme il a été souligné « la donation-partage transgénérationnelle porte à la fois sur la succession du donateur et sur la succession de l’enfant de la génération intermédiaire. Il conviendra donc, pour déterminer si une telle donation-partage est valable, de consulter nécessairement et cumulativement la loi applicable à la succession du donateur et de son enfant »20. B- Le traitement fiscal des libéralités-partages 24 - Exclusion du domaine du règlement. – La fiscalité est exclue du domaine du règlement européen n° 650/2012 (art. 1.1). À défaut de conventions internationales applicables, il faut envisager les règles du CGI. Or, il faut noter que très peu de conventions internationales portent sur les droits de mutations à titre gratuit des successions et des donations21. 25 - Droit de mutation. – Sont soumis au droit de mutation à titre gratuit les biens meubles et immeubles situés en France ou hors de France lorsque le donateur ou le défunt a son domicile fiscal en France (CGI, art. 750 ter) ou lorsque ces mêmes biens sont reçus par l’héritier, le donataire, le légataire ou le bénéficiaire d’un trust défini qui a son domicile fiscal en France (CGI, art. 750 ter, 3°). En revanche ne sont soumis au droit de mutation à titre gratuit que les biens meubles et immeubles situés en France lorsque le donateur ou le défunt n’a pas son domicile fiscal en France (CGI, art. 750 ter, 2°). 26 - Risque de double imposition. – On voit alors très bien le risque de double imposition. Si la libéralité partage porte sur un bien situé à l’étranger, le plus souvent un immeuble, le risque de double imposition est réel puisque le défunt ou le donateur devra un droit de mutation du fait de son domicile fiscal en France. Or, l’État du lieu de situation du bien peut prévoir sa propre fiscalité sur ce bien22. C’est d’ailleurs le cas du droit français où les droits de mutations sont prévus lorsque le bien est situé en France, alors que le donateur risque d’être taxé dans le pays de son domicile pour la même opération. REMARQUE  La libéralité partage peut perdre ainsi une partie de son intérêt. Certes l’article 784 A du CGI tempère l’inconvénient de la double imposition lorsqu’il prévoit que le montant des droits de mutation à titre gratuit acquitté, le cas échéant, hors de France est imputable sur l’impôt exigible en France23. Cette imputation est limitée à l’impôt acquitté sur les biens meubles et immeubles situés hors de France. - 51 - LE GUIDE DES ASSOCIATIONS & FONDATIONS 2023 ÉTUDE FAMILLE

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