Legs et Donations 2023

B. - Difficultés 9 - Plusieurs difficultés pratiques sont susceptibles de se poser, non seulement lors de sa conclusion, mais également lors de sa mise en œuvre. 1° Difficultés lors de la conclusion 10 - Date acceptation donation-partage – En principe, la donation-partage conjonctive est réalisée par un seul instrumentum que tous les enfants doivent accepter. Mais, la Cour de cassation16 a admis qu’une donation-partage puisse être formée dès qu’un enfant a accepté son lot17. Dans ce cas, le caractère conjonctif de la donation implique que les acceptations par les autres enfants interviennent impérativement du vivant des deux donateurs, donc avant le décès du premier donateur copartageant. À défaut, les conditions de l’article 1078 du Code civil n’étant pas remplies, l’évaluation des biens ne pourrait être réalisée au jour de l’acte, ce qui remettrait en cause les prévisions des disposants18. CONSEIL PRATIQUE  La prudence conduira le notaire à éviter une telle situation en favorisant les acceptations concomittantes des donataires. 2° Difficultés lors de la mise en œuvre 11 - La date d’évaluation des biens. – La détermination de la date d’évaluation des biens se pose pour le calcul de la réserve et de la quotité disponible ordinaire dans la mesure où les parents ont fondu leurs biens dans une seule masse afin d’en allotir leurs enfants. Deux hypothèses doivent être distinguées, selon que les conditions de l’article 1078 du Code civil sont ou non réunies. 12 - Application de l’article 1078 du Code civil : évaluation au jour de la donation-partage. – Lorsque les conditions des dispositions dérogatoires de l’article 1078 sont réunies – tous les héritiers réservataires vivants ou représentés allotis et absence de réserve d’usufruit portant sur une somme d’argent – les biens seront, « sauf convention contraire » évalués au jour de la donation-partage. Cette situation constitue « la règle d’or de sécurité de la donation-partage »19. 13 - En revanche, lorsque le donataire a réalisé des travaux sur le bien donné, par anticipation avant la donation-partage, est-il possible, avec l’accord de tous, de fixer la valeur du lot à une date antérieure à celle de l’acte répartiteur ? Une réponse négative a été apportée par une réponse ministérielle20 : 16 Cass. 1re civ., 13 févr. 2019, n° 18-11.642 : JurisData n° 2019-001941 ; Dr. famille 2019, comm. 108, M. Nicod ; JCP G 2019, n° 18, 479, note C. Brenner. 17 Ce qui est contestable tant un partage implique une répartition entre plusieurs héritiers présomptifs. 18 L’évaluation des biens serait alors faite au second décès, V. n° 15. 19 Expression de R. Leguidec, Successions et libéralités, JCP N 2012, n°21, 1234, spéc. n°6. 20 Rép. min. n° 535 : JOAN Q 7 juin 2016, p. 5113 ; JCP N 2016, n° 24, act.748. 21 Cass. 1re civ., 25 mai 2016, n° 15-16.160 : JurisData n° 2016-009853 ; Dr. famille 2016, comm. 184, M. Nicod. 22 Cass. 1re civ., 16 juin 2011, n° 10-17.499 : JurisData n° 2011-011613 ; RD rur. 2012, chron. 2, note R. Le Guidec et H. Bosse-Platière ; JCP N 2011, n° 36, 1237, note V. Zalewski ; DEF 2012, n° 40365, p. 191, note B. Vareille : bien que cette décision ait été rendue en application des règles antérieures à la loi du 23 juin 2006, ses règles sont transposables. 23 Cass. 1re civ., 16 juin 2011, n° 10-17.499, préc. : JCP N 2012, doctr. 228, obs. R. Leguidec. 24 M. Grimaldi (dir), Droit patrimonial de la famille : Dalloz, coll. Dalloz action, 2021-2022, spéc. n° 331.64. seule une date postérieure située entre l’acte de donation-partage et le décès peut être envisagée, une date antérieure est exclue. En outre, « le principe d’unicité de la date interdit de choisir des moments d’évaluation différents pour chacun des biens objets d’un même acte de donation-partage ». Cette solution est parfaitement logique dans la mesure où les donations-partages n’ont pas d’effet rétroactif. CONSEIL PRATIQUE  Il reste donc à conseiller aux gratifiés enthousiastes d’attendre l’acte de donation-partage pour entamer d’éventuels travaux, à peine de subir une augmentation de la valeur du bien du fait de ces derniers. 14 - Par ailleurs, en cas de contestation relative à la valeur d’un bien donné, si l’expertise immobilière démontre une différence entre la valeur réelle du bien et celle énoncée dans l’acte, c’est bien la première qui doit prévaloir et remplacer celle énoncée dans l’acte pour établir la masse de calcul de l’article 922 du Code civil et procéder aux imputations21. 15 - Exclusion de l’article 1078 du Code civil : évaluation au décès du second donateur. – Le refus d’un enfant de participer à l’acte ou l’allotissement d’une partie des enfants seulement fera échec à l’application de l’article 1078 du Code civil et conduira à l’évaluation des biens au décès du second donateur22. En effet, les donateurs ayant constitué « une masse unique de leurs biens pour les répartir sans considération de leur origine, […] la quotité dont celui qui a survécu à l’autre pouvait disposer n’étant déterminable qu’à son décès, la valeur de l’ensemble des biens donnés doit être fixée à cette date »23. Certes, l’établissement de la déclaration de succession lors du décès du premier aura nécessité une évaluation des biens, mais ceux-ci devront donc faire l’objet d’une nouvelle évaluation au second décès pour vérifier l’absence d’atteinte à la réserve24. Et, plus le délai entre celui-ci et l’acte répartiteur est long, plus le risque de modification des prévisions des donateurs sera grand. CONSEIL PRATIQUE  Il est donc essentiel que le notaire instrumentaire veille, dans toute la mesure du possible, à la réunion des conditions de l’article 1078 du Code civil, au risque que l’un des enfants n’ait à régler une forte indemnité de réduction. Il est donc essentiel que le notaire instrumentaire veille, dans toute la mesure du possible, à la réunion des conditions de l’article 1078 du Code civil - 33 - LE GUIDE DES ASSOCIATIONS & FONDATIONS 2023 ÉTUDE FAMILLE

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