La revue fiscale du patrimoine

réalisés dans le cadre d’une vente d’immeuble à rénover (VIR)38. 30 - Hors secteur du logement social, cette qualification d’immeuble ancien, sur laquelle la rénovation semble n’avoir aucune prise, est à l’origine de l’inadaptation du régime fiscal des mutations qui jalonnent le cycle de production de l’immeuble rénové sans être remis à neuf. B. - De l’acquisition de l’immeuble à rénover à la revente de l’immeuble demeuré ancien 31 - Dans cette configuration, la rénovation n’aboutit pas à la commercialisation d’un immeuble neuf. Le rénovateur doit gérer l’exonération de droits de mutation à titre onéreux à laquelle il peut prétendre lors de l’acquisition de l’immeuble à rénover et la TVA sur la revente de l’immeuble rénové. Par souci de symétrie, nous reprendrons le schéma adopté en première partie de cet article. 1° Achat de l’immeuble destiné à une rénovation « simple »/ TVA 32 - Dès lors que le projet de l’acquéreur rénovateur est sans effet sur le régime de l’acquisition de l’immeuble à rénover au regard de la TVA, le régime applicable à cette acquisition est le même que celui applicable à l’acquisition immobilière effectuée par le rénovateur/constructeur39. 33 - Droits à déduction. – En revanche, la situation du rénovateur se distingue nettement de celle du rénovateur/ constructeur s’agissant de l’exercice des droits à déduction de la TVA qui aurait, le cas échéant, grevé son achat immobilier. Contrairement au rénovateur/constructeur, le simple rénovateur destine l’immeuble « ancien » à être revendu, dans le même état d’immeuble non neuf, donc, en principe, en exonération de TVA. Or, confirmant la doctrine administrative40, pourtant sévèrement critiquée41le Conseil d’État a jugé que la déduction de la TVA qui aurait grevé l’achat d’un immeuble ancien acquis en vue de la revente, ne peut être opérée qu’à la date de la revente dudit l’immeuble, date à laquelle le cédant est autorisé à opter pour soumettre la vente à la TVA42. 34 - Cette règle qui oblige le marchand de biens à supporter le coût du portage de la TVA, s’applique également à la TVA qui grève (obligatoirement) les dépenses de travaux de rénovation ainsi que les dépenses qui s’incorporent dans le prix de revente de l’immeuble rénové. Ces inconvénients ont paru suffisamment sérieux pour queMme la rapporteure publique suggèrent aux autorités fiscales d’y remédier en modifiant les dispositions de l’article 201 quater de l’annexe II au CGI qui fixe la date de l’option pour soumettre la vente de l’immeuble à la TVA à la date de la vente. « La difficulté pourrait, le cas échéant, être levée en avançant la possibilité d’exercer l’option au moment de l’acquisition de l’immeuble, à charge pour le professionnel de reverser la taxe indument déduite si la revente n’est, in fine, pas soumise à la TVA »43. Affaire à suivre, donc. 2° Achat de l’immeuble destiné à la rénovation : engagement de revendre ou engagement de construire ? 35 - Principe – Engagement de revendre. – En principe, le rénovateur placera son achat sous le régime fiscal des achats en vue de la revente prévu à l’article 1115 duCGI 44.Moyennant la souscription, dans l’acte d’acquisition, de l’engagement de revendre l’immeuble, son acquisition ne rendra exigible que la taxe de publicité foncière au taux de 0,715 % prévue à l’article 1020 du CGI 45. L’exonération de droits de mutation à titre onéreux procurée au rénovateur est certes appréciable,mais la gestion, dans le temps, de l’engagement de revendre peut se révéler très peu compatible avec les aléas de la rénovation immobilière. Il convient en effet de ne pas perdre de vue que l’exonération n’est définitivement acquise au rénovateur que si la revente intervient dans un certain délai dont la durée n’est pas toujours à la main de l’acquéreur. Outre que le délai de revente, en principe de 5 ans, peut être ramené à 2 ans seulement dans certaines configurations46, il est important de ne pas perdre de vue qu’en cas de mutations successives entre assujettis, le rénovateur peut ne disposer que du reliquat du délai de revente opposable au premier acquéreur qui a placé l’achat de l’immeuble sous le bénéfice de ce régime de faveur. À supposer qu’il dispose de l’entier délai légal pour revendre, le rénovateur n’a aucun moyen d’obtenir la prorogation de ce délai 47. 38. L. n° 2021-1900, 30 déc. 2021 de finances pour 2020, art. 32 : JO 31 déc. 2021 ; Constr.-Urb. 2022, comm. 22, N. Gonzalez Gharbi. – A.-S. Marcelli, A. Zubalski, Extension du champ du taux de 5,5 % applicable aux opérations d’acquisition-amélioration de logements sociaux : Dr. fisc. 2022, comm. 73 ; FRS, 2/22, inf. 44. 39. V. n° 14 à 16. 40. BOI-TVA-IMM-10-30, n° 80. 41. M. Wolf, La neutralité, ce n’est pas « plus tard » : retour sur la déduction de la TVA d’achats des immeubles anciens : éd. F. Lefebvre, BF 1/20, étude, p. 5 à 10. 42. CE, 27 nov. 2020, n° 426091 : JurisData n° 2020-019218 : Lebon T., concl. C. Guibé, rapp. publ. – N. Gonzalez Gharbi, Immeubles anciens acquis en vue de la revente : pour détaxer, il faudra déstocker, louer ne suffit pas : Constr.- Urb. 2019, comm. 18. 43. Concl. C. Guibé, ss CE, 27 nov. 2020, préc. note 42, consultables sur le site du Conseil d’État. 44. Rappelons que l’Administration entend limiter l’accès au régime de faveur aux acquéreurs ayant déjà souscrit la déclaration d’existence exigée par l’article 286, I-1° du CGI : BOI-ENR-DMTOI-10-50, § 1. 45. Et la contribution de sécurité immobilière, CGI, art. 879. – En revanche, la taxe additionnelle prévue par l’article 1599 sexies du CGI n’est pas exigible, V. Rép. min. n° 95848 : JOAN 31 août 2016, D. Fasquelle. 46. Aux termes du dernier alinéa de l’article 1115 du CGI, « Pour les reventes consistant en des ventes par lots déclenchant le droit de préemption prévu à l’article 10 de la loi n° 75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d’habitation ou celui prévu à l’article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, le délai prévu pour l’application de l’engagement de revendre visé au premier alinéa est ramené à deux ans. ». Cass. com., 7 juill. 2015, n° 13-23.366, FS-P+B : JurisData n° 2015-016960 ; Constr.-Urb. 2015, comm. 161, N. Gonzalez Gharbi. – CA Paris, 28 mai 2013, n° 2012/02.161, Sté foncière de la Muette Brochant. – A. Malarret, Acquisition d’immeuble d’habitation en bloc, revente à la découpe et régime des marchands de biens. À propos du délai spécial de deux ans de l’article 1115, alinéa 4, du CGI : Dr. fisc. 2015, act. 151, aperçu rapide. – Sur le droit de préemption de l’article 10 de la loi n° 75-1351 du 31 décembre 1975, Cons. const., 9 janv. 2018, n° 2017-683 QPC. 47. BOI-ENR-DMTOI-10-50. – Guide de la publicité foncière : LexisNexis, V° Engagement de revendre. ÉTUDES LA REVUE FISCALE DU PATRIMOINE N° 4, AVRIL 2022 39

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