CHRONIQUE RURAL 1160 Page 57 LA SEMAINE JURIDIQUE - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 36 - 8 SEPTEMBRE 2023 - © LEXISNEXIS SA porte pas la résiliation du bail en cas de défaut d’information, si le bail s’est renouvelé (Cass. 3e civ., 6 juill. 2022, n° 21-12.833, FS-B : JurisData n° 2022-011366 ; RD rur. 2022, comm. 131, S. Crevel). Cette solution, dont la portée demeure incertaine (S. de Los Angeles, Bail rural à des époux copreneurs et départ de l’un d’eux, la purge par le renouvellement : Rev. Loyers 1er juill. 2023, n° 1039) n’est toutefois appliquée qu’aux époux ou partenaires de Pacs. 28 - Situation de copreneurs personne physique et morale. – La situation n’avait en revanche pas été tranchée en cas de coprise à bail entre une personne physique et une personne morale. C’est chose faite par cet arrêt du 7 décembre 2022 : la dissolution d’une société équivaut à la cessation d’activité. Le copreneur continuant à exploiter devra alors en informer son bailleur pour demander la poursuite du bail à son seul nom. 29 - Une proposition de loi déposée en janvier 2023 (AN, prop. de loi n° 746, 17 janv. 2023) souhaite modifier le régime introduit en 2014, et ainsi subordonner la résiliation à la preuve d’un préjudice subi par le bailleur. Une telle solution vise à sécuriser les baux en cours, lesquels sont fragilisés. En effet, le texte de 2014 prévoit que ce régime s’applique aux baux en cours, et que si un copreneur a cessé son activité antérieurement à l’entrée en vigueur, le copreneur restant dispose d’un délai de 3 mois à compter de la promulgation de la loi pour en informer le bailleur. ATTENTION ➜ Aujourd’hui, il convient pour les praticiens d’être vigilants. Tout départ d’un copreneur doit faire l’objet d’une information au profit du bailleur. À défaut, le risque est conséquent. La non-information du départ d’un copreneur est soumise à un régime de résiliation du bail péremptoire. MANON SAHUT 2° Bail rural et contrôle des structures : l’articulation du congé-reprise et de la formalité déclarative 30 - À quel moment déclarer ? – Dans le cas où l’exercice du droit de reprise des biens loués par bail à ferme peut relever du régime dérogatoire de la déclaration préalable, à quel moment convient-il pour celui qui s’en prévaut d’accomplir cette formalité ? 31 - Exercice du droit de reprise sous couvert d’une simple déclaration ? – La question se pose depuis la réforme du contrôle des structures par la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014. À propos des conditions du régime déclaratif, l’article L. 331-2, II du Code rural modifié dispose désormais que les biens objet de la transmission intrafamiliale « sont libres de location », et non plus « libres de location au jour de la déclaration » comme avant. Autrefois aussi, l’article R. 331-7 du Code rural précisait que, dans le cas d’une reprise d’un bien loué, le bénéficiaire pouvait adresser sa déclaration au plus tard dans le mois suivant le départ effectif du preneur en place. Mais à la suite du décret d’application n° 2015-713 du 22 juin 2015, le texte se contente de dire que « la déclaration doit être préalable à la mise en valeur des biens ». Subsistait donc un doute, quand les surfaces sont occupées par un fermier, sur la possibilité pour le bailleur de faire valoir son droit de reprise sous couvert d’une simple déclaration. À la suite du Conseil d’État, la Cour de cassation lève l’ambiguïté dans son arrêt du 25 mai 2023. 32 - Faits litigieux. – Un couple avait donné à bail rural deux parcelles à une agricultrice qui les avait mises à disposition de son EARL. À la suite de la vente des biens par les bailleurs à un neveu fin 2015, celui-ci a délivré congé à la locataire en vue de reprendre les terres pour les exploiter au 10 novembre 2017. La titulaire du bail s’y est opposée en demandant l’annulation du congé. La cour d’appel de Besançon rejette la requête et valide le congé avec effet à compter du 15 février 2021. Or, à cette date, l’auteur de la reprise n’était pas en conformité avec le contrôle des structures dans la mesure où les débats devant la cour n’avaient pas encore eu lieu, et que le fermier n’avait pas décampé. Tel est l’argument principal que l’exploitante agricole, dans un ultime recours, formule dans son pourvoi. Argumentation écartée par la troisième chambre civile de la Cour de cassation. 33 - Tout vient à point à qui sait attendre. – Au motif que l’article R. 331-7 du Code rural, depuis 2015, dispose que la déclaration doit être préalable à la mise en valeur des biens, la Cour en déduit que « le bénéficiaire d’un droit de reprise n’est pas tenu de justifier du dépôt de cette déclaration dès la date d’effet du congé, mais seulement avant de mettre en valeur les biens ». En l’espèce, le bénéficiaire de la reprise n’était donc pas tenu d’accomplir cette formalité durant l’instance en validation du congé ; il pouvait attendre son issue et que le preneur débarrasse le plancher des vaches ! 34 - La solution s’inspire de ce qu’avait écrit, hier, la jurisprudence administrative au moment de vérifier la légalité du nouvel article R. 331-7 (CE, 31 mars 2017, n° 392875 : JurisData n° 2017-007187 ; Dict. perm. Entreprise agricole, Bull. avr. 2017, p. 1, note B. Grimonprez). Elle soulignait alors que le repreneur pouvait valablement déposer sa déclaration de manière anticipée en cours de bail (avec prise d’effet après la libération des lieux), mais surtout qu’il pouvait attendre le départ du locataire pour l’effectuer. En conséquence de quoi, il n’est pas nécessaire, en cas de contentieux, de vérifier l’accomplissement de la formalité à la date d’effet du congé. CONSEIL PRATIQUE ➜ En pratique, il convient donc de disjoindre les conditions de fond du régime déclaratif, qui doivent être scrutées par les juges lors de l’instance en validation du congé, de sa mise en œuvre formelle par le dépôt même de la déclaration, lequel peut intervenir tant que le repreneur n’a pas commencé à exploiter. BENOÎT GRIMONPREZ 3° La qualification du délai du preneur pour agir en indemnisation des améliorations : une forclusion 35 - Indemnité des améliorations due par le bailleur au preneur ? – L’arrêt du 9 mars 2023 porte sur la question de l’indemnité due par le bailleur au preneur, au titre des améliorations sur le fonds loué que le second a effectué en cours de bail. La difficulté tenait au délai de 12 mois fixé par le dernier alinéa de l’article L. 411-69 du Code rural et de la pêche maritime, tel qu’issu de la loi d’avenir agricole n° 20141170 du 13 octobre 2014. 36 - Les faits de l’arrêt. – Les faits à l’origine de l’arrêt une fois encore sont très classiques et les praticiens du droit rural retrouveront là une
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