La Semaine Juridique Notariale et Immobilière

1177 ÉTUDE FISCAL Page 76 © LEXISNEXIS SA - LA SEMAINE JURIDIQUE - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 36 - 6 SEPTEMBRE 2024 dire une société comptant parmi ses associés au moins une autre société signataire de l’engagement collectif, est concernée par ce formalisme ; et ce quand bien même le régime de l’interposition ne s’applique pas à la transmission. C’est le cas lorsque la donation ou la transmission à cause de mort porte directement sur les titres de la société faisant l’objet de l’engagement collectif de conservation et non sur ceux de la société interposée. 11 - Interprétation littérale. – Deux attitudes sont envisageables face à une telle rédaction. Une interprétation littérale du texte et de la doctrine administrative peut être retenue. Cette option conduit à établir ces attestations en présence de toute société interposée, même lorsque le régime spécifique de l’interposition ne s’applique pas lors de la transmission. Retenir une telle approche conduit à examiner de manière systématique l’actionnariat de la société dont les parts ou actions font l’objet du pacte d’associés ; et, lorsqu’il compte une ou plusieurs sociétés signataires du pacte, à établir les attestations spécifiques (CGI, art. 294 bis, I, 2°, b et II, 2°, VI, 2, a, al. 2, ann. II) qui s’ajoutent à celles de droit commun. Multiples, ces attestations spécifiques concernent la ou les sociétés interposées, leur actionnariat ainsi que la société dont les titres font l’objet de l’engagement collectif. Un tel modus operandi a été prôné20, en relevant qu’au regard des textes, ces attestations doivent être établies par toutes les sociétés interposées et non uniquement par celles composant une chaîne de participation ayant été activée lors de la transmission. 12 - Interprétation téléologique. – Une autre approche est possible. Devant à nos yeux être privilégiée21, elle consiste à retenir une interprétation téléologique des dispositions concernées. Elle conduit à réserver la production de ces attestations spécifiques aux seules situations dans lesquelles le régime de l’interposition est effectivement revendiqué par les redevables lors de la transmission, l’exonération s’appliquant indirectement au titre de ce régime particulier, avec une assiette restreinte. Il convient en revanche de les écarter lorsque la transmission porte directement sur les titres de la société faisant l’objet de l’engagement collectif de conservation22. Au fond produire ces attestations en dehors des cas dans lesquels le régime de l’interposition est effectivement appliqué lors de la transmission confinerait à l’absurde. Cela conduirait à certifier des exigences qui ne sont pas requises pour le bénéfice du régime de faveur. Matériellement, les certifications requises s’avéreraient impossibles à satisfaire : comment, par exemple, identifier celui et ceux des associés de la société interposée tenus de conserver inchangée la participation qu’il détient dans cette société comme 20 V. P. Julien Saint-Amand, F. Bonte, J.-J. Lubin, Ch. Panya et A. Tellier, Aménagements des pactes Dutreil-transmission : nouvelles attestations et formules (3e partie) : RFP 2019, formule 4, p. 2. 21 V. JCl. Fiscal, fasc. 7716, n° 313, par F. Fruleux. 22 V. JCl. Fiscal, fasc. 7716, n° 313, par F. Fruleux. l’imposent les textes (CGI, art. 294 bis, VI, 1, a, ann. II), alors que cette obligation ne s’applique pas en l’espèce ? Produire de tels justificatifs pourrait en outre être source de confusion et s’avérer être contre-productif lorsque, comme c’est souvent le cas, le bénéficiaire de la transmission directe des titres de la société cible est par ailleurs associé de la société interposée. Délivrer ces attestations porterait accroire qu’au titre de la transmission directe, le bénéficiaire serait tenu de conserver inchangée la participation qu’il détient dans la société interposée, ce qui est inexact. 13 - Revirement d’analyse de l’Administration. – Dans ses commentaires antérieurs au 4 avril 2024, l’administration fiscale se bornait à paraphraser les textes. Elle rappelait sans restriction la nécessité de satisfaire à ces obligations déclaratives relatives aux sociétés interposées, sans énoncer aucune mesure de tempérament23. Elle laissait ainsi entendre qu’en dépit de leur incongruité, le non-respect de ces obligations déclaratives était susceptible d’être sanctionné par la remise mise en cause du régime de faveur. Nous doutions que tel puisse être effectivement le cas24. Compte tenu de la jurisprudence qui assure un contrôle de proportionnalité en matière de sanction fiscale25, il nous semblait possible de contester que l’administration fiscale pût infliger une telle sanction à un redevable, au motif qu’il n’aurait pas attesté du respect de conditions n’étant pas requises pour bénéficier de l’exonération partielle. L’administration fiscale modifie son analyse dans ses commentaires publiés le 4 avril 2024. Reconnaissant que l’exigence de conservation inchangée des participations ne s’applique pas aux transmissions directes de titres de sociétés interposées, elle admet que le défaut de production des attestations spécifiques n’est pas de nature à faire obstacle au bénéfice de l’exonération partielle : « dès lors que (…) l’exigence de conservation inchangée des participations ne s’impose qu’aux associés souhaitant bénéficier de l’exonération partielle et aux sociétés interposées entre ces associés et la société cible (…), le défaut de production de ces attestations ne fait pas obstacle au bénéfice de l’exonération partielle »26. 23 BOI-ENR-DMTG-10-20-40-30, 6 avr. 2021, § 37. 24 V. JCl. Fiscal, fasc. 7716, n° 313, par F. Fruleux. 25 Cass. com., 23 sept. 2008, n° 07-11.989 : JurisData n° 2008-045081 ; Dr. fisc. 2008, n° 47, comm. 589, note J.-P. Maublanc. ‒ JCl. Fiscal, fasc. 9415, n° 88, par L. Ayrault. 26 « Le deuxième alinéa du a du 2° du IV de l’article 294 bis de l’annexe II au CGI prévoit qu’en cas d’interposition d’une ou plusieurs sociétés entre un associé à l’engagement autre que l’héritier, le donataire ou le légataire et la société dont les parts ou actions font l’objet de l’engagement de conservation, cette dernière fournit les attestations prévues au présent I-B § 37 pour le cas des sociétés qui composent une chaîne de participations, lesquelles lui sont transmises par la ou les sociétés interposées. Toutefois, dès lors que l’associé d’une société interposée n’est pas de ce seul fait partie à l’engagement de conservation dans la société cible et que l’exigence de conservation inchangée des participations ne s’impose qu’aux associés souhaitant bénéficier de l’exonération partielle et aux sociétés interposées entre ces associés et la société

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