La revue fiscale du patrimoine

11 On ne peut donc que rejeter l’analyse qui consiste à qualifier systématiquement le contrat d’assurance-vie accepté de donation indirecte entre le souscripteur et le bénéficiaire. 12. - Requalification possible en l’absence d’acceptation « dum vit ». - Pour la Cour de cassation14, la requalification du contrat d’assurance-vie en donation indirecte est acquise dès lors que « les circonstances dans lesquelles le bénéficiaire a été désigné révèlent la volonté du souscripteur de se dépouiller de manière irrévocable »15. Parmi ces circonstances favorables à la requalification ne figure pas nécessairement l’acceptation « dum vit ». En revanche, on y trouve celle de la certitude de l’impossibilité de tout rachat par le souscripteur dès la souscription en raison d’un décès certainement très imminent. Dans ce type de contentieux, celui qui soutient la requalification en donation doit rapporter la preuve que le souscripteur se savait condamné à très court terme dès la souscription du contrat ou le versement de la prime sur celui-ci. Lorsqu’un tel contexte existe, peu importe la non-acceptation « dum vit » de la clause bénéficiaire. C’est ce qui résulte clairement d’un arrêt rendu en 2010 par la Cour de cassation16 dans lequel la requalification a été admise alors même que les clauses bénéficiaires des contrats d’assurance-vie litigieux n’avaient pas été acceptées du vivant du souscripteur. Il serait dommage qu’une interprétation trop rapide de l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 20 novembre 2019 détourne les praticiens de cet outil d’ingénierie patrimoniale qu’est l’acceptation « dum vit » du contrat d’assurancevie. CONSEIL PRATIQUE Toutefois, eu égard au contentieux pouvant exister sur le sujet de la qualification du contrat accepté du vivant, il est de bonne pratique que toute acceptation « dum vit » d’un contrat d’assurance-vie s’accompagne d’un acte, notarié ou sous signature privée enregistré, rédigé avec soin. Il devra expliciter le contexte de cette acceptation afin de pouvoir facilement repousser d’éventuelles tentatives de requalification de l’assurance-vie contractée en donation sur le fondement de l’acceptation consentie sur un contrat non encore dénoué. 14  Le rapport Cécile Pérès sur la réserve héréditaire propose que soient inscrits dans le Code civil des critères pour une telle requalification. 15  Cass. ch. mixte, 21 déc. 2007, n° 06-12.769 : JCP N 2008, n° 15, 1174, note R. Riche. 16  Cass. com., 26 oct. 2010, n° 09-70.927 : JurisData n° 2010-019725 ; RFP 2011, comm. 15. 13. - Dans tous les cas, l’utilisation de cet acte d’acceptation doit être mûrement réfléchie. Car la désignation du bénéficiaire, dès lors que ce dernier a accepté, est définitivement figée, sauf le cas du conjoint survivant et sauf, bien sûr, le cas de modification décidée d’un commun accord entre le souscripteur et le bénéficiaire. Aussi, dans l’hypothèse où le contrôleur de la consommation des fonds n’est pas celui que l’on veut comme bénéficiaire des capitaux décès, il faudra faire preuve d’une plus grande sophistication dans l’ingénierie patrimoniale. On pourra notamment désigner comme bénéficiaire une société civile dont le gérant sera le contrôleur de la consommation des capitaux et la ou les personne(s) physique(s) destinataire(s) des capitaux, l’(les) associé(s). L’ESSENTIEL A RETENIR •  L’acceptation du contrat d’assurance-vie par le bénéficiaire des capitauxdécès du vivant du souscripteur est un outil d’ingénierie patrimoniale aux multiples utilités. •  L’une d’entre elles est de permettre d’organiser une protection du souscripteur contre sa propre (éventuelle) vulnérabilité (tendance à la prodigalité, crainte de perte de ses facultés intellectuelles…). •  Dans un tel contexte et sous réserve de soigner la rédaction de l’acte d’acceptation, toute tentative de requalification en donation d’un contrat accepté doit être rejetée.

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