27 Solution. – Des liquidités importantes, nettement supérieures aux charges courantes d’une entreprise individuelle, peuvent faire échec à l’exonération partielle de droits de mutation gratuite (CGI, art. 787 C). Impact. – La chambre commerciale de la Cour de cassation invite les praticiens à vérifier le niveau de trésorerie admissible pour une transmission à titre gratuit sans encombre. Cass. com., 9 févr. 2022, n° 20-10.753, F-D+B : JurisData n° 2022-002029 L’arrêt1 est inédit et révèle à n’en pas douter les limites hautes de l’optimisation fiscale à ne pas franchir. Il rappelle la portée de l’exonération partielle de droits de mutation à titre gratuit qui doit en principe concerner le seul patrimoine professionnel. 1. Les faits Un exploitant agricole décède en 2012 laissant pour légataires universels ses deux neveu et nièce. Ces derniers sollicitent l’exonération partielle de l’article 787 C du CGI. L’Administration ne contestait pas les conditions principales de l’exonération partielle de droits de mutation à titre gratuit, à savoir la détention de l’entreprise individuelle depuis plus de 2 ans, la conservation des actifs pendant une durée minimum de 4 ans et la poursuite de l’exploitation pendant les 3 années qui suivent la transmission de l’exploitation de l’entreprise. L’objet du litige était ailleurs, peu courant au demeurant, à savoir le niveau de trésorerie figurant au bilan de l’entreprise individuelle pour un montant de 286 565,59 €. L’administration fiscale envoya une proposition de rectification aux légataires et réclama les droits de succession à raisons des liquidités jugées excédentaires. L’arrêt rappelle que des valeurs mobilières de placement d’un montant de 90 121,52 € et des sommes provenant de la succession de son épouse prédécédée s’élevant à 115 192,79 €, avaient intégré l’assiette fiscale de Ndlr : Commentaire publié in RFP 2022, comm. 4. 1 Voir Annexe l’exploitation agricole léguée, et augmenté corrélativement l’exonération de l’article 787 C du CGI. 2. L’affectation des biens à l’exploitation vautelle nécessité ? C’était un des arguments du contribuable. L’article 787 C du CGI exonère l’ensemble des biens meubles et immeubles, corporels ou incorporels affectés à l’exploitation d’une entreprise individuelle. La doctrine administrative précise que les biens affectés à l’exploitation sont les biens nécessaires à l’exercice de la profession (V. BOI-ENRDMTG-10-20-40-40, 6 avr. 2021, n° 10). Se fondant sur une interprétation stricte du texte, il était aisé pour le contribuable de soutenir que l’exonération partielle devait porter sur les biens affectés à l’exploitation et non sur les biens strictement nécessaires à celle-ci. Le juge d’appel ne retient pas l’argument. Un bien affecté à l’exploitation est en quelque sorte un bien nécessaire par nature. La chambre commerciale de la Cour de cassation nous propose un raisonnement identique. La référence à l’ISF est ici patente. L’article 885 O ter du CGI dispose que « Seule la fraction de la valeur des parts ou actions correspondant aux éléments du patrimoine social nécessaires à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de la société est considérée comme un bien professionnel ». On remarquera toutefois que la condition de nécessité résulte ici du texte légal. L’article 885 N du CGI est de la même veine : « Les biens nécessaires à l’exercice, à titre principal, tant par leur propriétaire que par le conjoint de celui-ci, d’une profession industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale sont considérés comme des biens professionnels ». Il faut reconnaître que les faits n’étaient pas en faveur des héritiers. − l’entreprise agricole ne disposait pas de compte bancaire professionnel ; le compte personnel du défunt comprenait donc des opérations privées et professionnelles ; Dispositif Dutreil : le piège tendu de la trésorerie excédentaire Jean-Jacques Lubin, fiscaliste au CRIDON de Paris, membre du comité scientifique de la Revue fiscale du patrimoine © Droits réservés
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