La revue fiscale du patrimoine

15 Une préoccupation centrale du souscripteur d’un contrat d’assurance-vie qui désigne comme bénéficiaire des capitaux-décès un majeur vulnérable est de mettre en place un contrôle de la consommation par ce dernier des fonds reçus au moment du dénouement du contrat. Les outils et l’ingénierie patrimoniale susceptibles d’être utilisés pour obtenir une telle sécurité sont variés et certains, notamment la fiducie gestion, encore trop peu connus. Il est indispensable, avant de retenir l’une ou l’autre des solutions dans un cas d’espèce donné, de s’assurer de sa bonne réception par la compagnie d’assurances avec laquelle l’opération doit être conclue. 1. - La transmission de patrimoine réalisée au décès comporte souvent une partie d’épargne investie dans un contrat d’assurance-vie. La personne désignée comme bénéficiaire reçoit alors les capitaux-décès qui représentent généralement le total des primes versées sur le contrat d’assurance-vie par le souscripteur, par hypothèse décédé, augmenté des intérêts acquis et diminué des frais de gestion. 2. - Le souscripteur peut être inquiet d’une consommation trop rapide et déraisonnable des capitaux-décès par le bénéficiaire qu’il a désigné. Si ce dernier est placé sous un régime de protection, l’organe de protection saura encadrer la gestion et la consommation des fonds reçus. Cependant, d’une part, le bénéficiaire peut n’être placé sous aucun régime de protection et, d’autre part, le souscripteur peut ne pas avoir confiance dans la protection mise en place. Il faut alors chercher une solution de contrôle de la gestion et de la consommation des capitaux-décès ailleurs que dans les règles gouvernant les régimes de protection des majeurs vulnérables. Ndlr : Étude publiée in JCP N 2022, n°24, 1177. 1 V. sur ce pt Mémento Lefebvre [Patrimoine] 21-22, n° 28213. 2  Cass. 1re civ., 8 déc. 1987, n° 85-11.769 : JurisData n° 1987-002037. 3. - Compagnie d’assurances. - Une première solution consiste, pour le souscripteur, à se reposer sur la compagnie d’assurances et à prévoir une sortie du contrat d’assurance-vie en rente viagère plutôt qu’en capital. Ainsi, la compagnie conserve au décès du souscripteur la gestion des fonds, tout en en contrôlant la consommation par le bénéficiaire. Toutefois, cette stratégie n’est ni financièrement, ni fiscalement avantageuse1. Elle manque de souplesse dans l’ajustement des fonds débloqués au profit du majeur vulnérable aux besoins réels de ce dernier et prive définitivement les héritiers du bénéficiaire de la chance de récupérer le résidu des capitaux-décès non consommés par leur auteur. Elle n’est donc que très rarement mise en place. 4. - Tiers de confiance. - Une autre solution consiste à désigner un tiers de confiance pour gérer les capitaux-décès. Plusieurs schémas sont alors envisageables. 5. - Schéma 1. Stipulation de charges. - La solution apparemment la plus simple consiste à nommer dans la clause bénéficiaire un tiers de confiance chargé de gérer les capitaux-décès et d’en contrôler la consommation par le bénéficiaire. Le bénéficiaire ne peut recevoir les capitaux-décès que sous l’obligation d’en laisser la gestion au tiers ainsi désigné. Empruntant la technique de la charge, parfaitement conciliable avec le mécanisme de la stipulation pour autrui2 sur lequel repose la clause bénéficiaire, une telle désignation repose sur la mise en place d’un mandat. 6. - Se pose la question du contrôle de l’exécution de la charge. Ici, il faut avoir à l’esprit qu’il n’appartient pas aux compagnies d’assurances de contrôler la bonne exécution des charges inscrites dans une clause bénéficiaire. Il convient donc de mettre en place un système sur mesure et efficace. Ce qui est parfaitement réalisable grâce à la possibilité prévue par l’article L. 132-8 du Code des assurances d’une rédaction de la clause bénéficiaire en la forme testamentaire. En effet, le choix de la forme testamentaire permet d’instituer un « contrôleur de l’exécution de la charge » qui n’est autre qu’un exécuteur testamentaire doté notamment d’un Assurance-vie : contrôler la consommation des capitauxdécès reçus par le bénéficiaire majeur vulnérable Sébastien Comparot, avocat associé du cabinet d’avocats FIDAL Claire Farge, docteur en droit, avocate au sein du cabinet d’avocats FIDAL, co-présidente de la commission Ingénierie patrimoniale de l’ACE-Avocats ensemble © Droits réservés © Droits réservés

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