La Revues Fiscale du Patrimoine

dotation étaient en activité, avec un record de 451 créations la même année (selon l’Observatoire de la philanthropie – Fondation de France). Le succès du fonds de dotation – s’expliquant également par sa fiscalité particulièrement attractive – confère aux activités les plus nobles un second souffle d’autant plus fort qu’elles font l’objet de la plus vive actualité. Culture, écologie et solidarité deviennent alors des secteurs attractifs et garantissent l’accès à un objectif tant de fois espéré : une plus juste répartition des richesses. COMMENTAIRE 1. Le fonds de dotation : une entité dans l’air du temps Le fonds de dotation a la particularité d’être un outil juridique s’inscrivant dans l’air du temps, en répondant à des problématiques propres à notre époque : la diffusion de la culture, la protection de l’environnement, l’action humanitaire, l’insertion sociale et économique... Depuis 2009, des entreprises de divers horizons ont décidé de créer un fonds de dotation, telles que Crédit Agricole, Dassault Système ou encore Peugeot. Mais qu’est-ce qui a fait franchir le cap à ces sociétés ? 1° Une personne morale au service de l’intérêt général Le fonds de dotation est une personne morale de droit privé à but non lucratif, philanthropique, dédiée au mécénat et à la réalisation de missions d’intérêt général. Il a vocation à recevoir et gérer, en les capitalisant, des biens et droits de toute nature qui lui sont apportés à titre gratuit et irrévocable. Il utilise ensuite les revenus de la capitalisation en vue de la réalisation d’une œuvre ou d’une mission d’intérêt général. Le fonds peut également les redistribuer pour assister une autre personne morale à but non lucratif dans l’accomplissement de ses œuvres et de ses missions d’intérêt général. Il peut s’agir d’une mission à caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, familial, sportif ou culturel. Le fonds de dotation s’inscrit dans l’air du temps en ce qu’il répond aux enjeux d’indépendance et de protection du secteur de la culture. Par exemple, en 2019, des ayants droits d’artiste, comme ceux de Jean-Pierre Bertrand,ont été séduits par le fonds de dotation pour inventorier, authentifier, conserver et valoriser son œuvre. Les entreprises ont également su cerner le potentiel des fonds de dotation dans une époque où les préoccupations sociales et environnementales reviennent au cœur des débats. Ainsi, Michel-Edouard Leclerc, qui préside le comité stratégique des centres E. Leclerc, a créé en 2012 le « fonds Hélène et Edouard Leclerc ». Son objectif ? Rendre l’art contemporain accessible au plus grand nombre. On peut apercevoir l’intérêt publicitaire de la mise en place d’un fonds de dotation pour de tels entrepreneurs. En effet, il permet d’échapper à la connotation mercantile que laisse supposer la fondation d’entreprise, tout en répondant à un enjeu« marketing »pour l’enseigne. En 15 ans, le fonds de dotation est devenu un véritable outil de financement de l’intérêt général, mais également un acteur majeur dans la sauvegarde de l’environnement. Par exemple, le premier fonds de dotation créé en 2009, le fonds «ThoiryPeaugres Conservation », avait pour objet la conservation de la biodiversité et la promotion du développement durable. 2° Une entité hybride À première vue, le fonds de dotation peut aisément être comparé à une association ou à une fondation reconnue d’utilité publique. Et pourtant, le fonds de dotation est doté de caractéristiques qui lui sont propres, le plaçant à mi-chemin entre ces deux autres entités. a) Fonds de dotation et association Le fonds de dotation est aussi rapide à constituer qu’une association. En effet, le fonds est créé par une simple déclaration en préfecture, sans autorisation préalable d’une quelconque autorité. D’un point de vue fiscal, les associations et les fonds de dotation bénéficient du régime applicable aux organismes sans but lucratif. Ainsi, les revenus de telles structures ne sont pas soumis aux impôts commerciaux, les versements qu’elles reçoivent ouvrent droit au régime fiscal du mécénat et sont exonérés des droits d’enregistrement. Mais ces deux entités se distinguent par leur statut juridique et leurs modalités de gouvernance. Par exemple, la création d’une association n’est pas soumise à un apport financier initial, alors que la création du fonds est subordonnée à une dotation initiale minimum. Et contrairement à la plupart des associations, les fonds de dotation peuvent recevoir librement toute forme de libéralités, dont les donations et les legs. b) Fonds de dotation et fondation reconnue d’utilité publique Comme une fondation reconnue d’utilité publique (FRUP), le fonds de dotation consiste en l’affectation de biens à un but d’intérêt général. À ce titre, le fonds de dotation et les FRUP disposent d’une« grande capacité juridique », avec la possibilité de détenir et de gérer des immeubles de rapport et de faire appel à la générosité du public. Mais la gouvernance du fonds de dotation est plus souple que celle d’une FRUP, étant donné que la composition du conseil qui administre le fonds est libre. En revanche, le fonds de dotation ne peut bénéficier de subventions publiques, sauf dérogation exceptionnelle accordée sur autorisation ministérielle, à l’inverse des FRUP. Le fonds de dotation s’impose comme une structure hybride, combinant les atouts de l’association et de la fondation, sans la plupart de leurs inconvénients. L’atout majeur du fonds est sa capacité à recueillir des libéralités (dons, legs) sans avoir à réaliser de déclaration auprès de l’autorité préfectorale. 2. Une structure tout en nuances : à la fois réglementée et souple Afin de rendre le fonds de dotation le plus attractif possible, le législateur a créé un régime très souple et simplifié. En effet, l’objectif est de favoriser le mécénat privé avec la création d’un outil juridique permettant d’attirer les investisseurs français, mais aussi et surtout, les investisseurs étrangers. CAHIERS PRATIQUES Fiche pratique LA REVUE FISCALE DU PATRIMOINE N° 6, JUIN 2024 41

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