La Revues Fiscale du Patrimoine

1° Préjudice moral des sociétés fiscalement opaques 23 - S’agissant des sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés, compte tenu des dispositions de l’article 209 du CGI, qui impliquent un renvoi à l’article 38 du CGI, la détermination du bénéfice imposable obéit aux mêmes règles que celles qui gouvernent la détermination des bénéfices industriels et commerciaux, de telle sorte qu’il conviendrait de tenir compte de l’arrêt du Conseil d’État rendu le 12 mars 198235 excluant ces indemnités du bénéfice imposable – nonobstant les dispositions de l’article 38, 2 du CGI. 2° Préjudice moral des sociétés fiscalement translucides 24 - S’agissant des groupements relevant du régime fiscal des sociétés de personnes, et dès lors que leur bénéfice imposable est déterminé selon les règles propres à leur activité, il y aurait nécessairement lieu de se référer aux solutions dégagées à l’égard des exploitants individuels, au regard de chaque cédule d’imposition (bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices non commerciaux, bénéfices agricoles) : cette solution entraînerait ainsi l’exonération des indemnités pour préjudice moral versées aux sociétés de personnes réalisant des revenus fonciers (le plus généralement, SCI) ou des revenus mobiliers (sociétés civiles de portefeuille). B. - Préjudice moral et imposition des personnes morales sans personnalité fiscale 25 - Il s’agit ici des sociétés fiscalement transparentes, c’està-dire des entités visées à l’article 1655 ter du CGI. Le régime de la transparence fiscale, auquel sont soumises les sociétés d’attribution que la loi fiscale dénomme sociétés immobilières de copropriété, consiste à considérer que, sur le plan fiscal, ces sociétés sont réputées ne pas avoir d’existence distincte de celle de leurs membres, lesquels sont traités comme s’ils étaient directement propriétaires des locaux auxquels leur donnent vocation les actions ou parts qu’ils détiennent. Au regard des impôts directs, la transparence fiscale conduit à considérer l’associé comme un propriétaire direct des locaux auxquels donnent vocation les droits sociaux qu’il détient, notamment pour l’imposition des revenus procurés par l’immeuble, des plus-values éventuelles, ou encore au regard des impôts locaux ; il s’ensuit que l’imposition des revenus des immeubles construits, acquis ou gérés par les sociétés susvisées est établie aux noms des associés eux-mêmes en tenant compte exclusivement du régime fiscal auquel ceux-ci sont personnellement soumis ; il en résulte que si l’associé est une personne physique, agissant dans le cadre de la gestion de son patrimoine privé, qui donne en location les locaux auxquels donnent jouissance les actions ou parts sociales qu’il détient, le revenu correspondant est déterminé suivant les modalités prévues pour les revenus fonciers. 26 - Si nous avons exclu l’application de la doctrine administrative s’agissant des sociétés dotées d’une personnalité fiscale, il doit en aller a fortiori à l’encontre des sociétés sans personnalité fiscale. Dans la mesure où ces sociétés ne disposent légalement d’aucune personnalité fiscale, de telle sorte que leurs associés sont assimilés à des propriétaires directs et indivis du patrimoine social, force est d’en tirer les conséquences : les indemnités versées à ces sociétés en compensation d’un préjudice moral doivent être, fiscalement, considérées comme ayant été directement versées aux associés, et ne peuvent être soumises à l’impôt. Cette solution nous paraît procéder d’une logique de bon sens : il serait en effet incongru de considérer que ces entités n’ont pas d’existence distincte de celle de leurs membres en ce qui concerne l’imposition des revenus patrimoniaux, tandis qu’elles se distingueraient de leurs associés en ce qui concerne l’imposition des revenus extra-patrimoniaux ... La transparence fiscale doit ici s’appliquer pleinement, et entraîner l’application, à ces indemnités, de la fiscalité qui serait applicable aux associés s’ils étaient juridiquement propriétaires directs et indivis du patrimoine social, puisque telle est précisément leur situation fiscale.Á 35. V. n° 7. 24 LA REVUE FISCALE DU PATRIMOINE N° 6, JUIN 2024

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