le donataire afin d’anticiper les projets de ce type. Pour lui permettre de disposer des fonds lui permettant de régler lesdits droits, le donataire pourra se voir gratifié, en sus, d’une somme d’argent. À cet égard, le don familial lui permettra de bénéficier, si les conditions exigées sont réunies22, d’un abattement supplémentaire de 31 865³(CGI, art. 790 G). S’il n’est pas possible de compléter la donation par un don de liquidités, le prêt familial s’avèrera également judicieux. Bien évidemment, le remboursement des sommes mises à disposition sera, en l’occurrence, indispensable23, à défaut de quoi une donation serait, là aussi, susceptible d’être caractérisée24. 2° Des conséquences dommageables par suite de certaines donations de nue-propriété 23 - La prise en charge des droits de donation par le donateur est aussi susceptible d’entraîner d’autres conséquences fiscales ultérieures lorsque le donataire reçoit des biens en nue-propriété seulement. 24 - Tout d’abord, lorsque la donation de nue-propriété prévoit parallèlement la stipulation d’un usufruit successif au profit du conjoint, le donataire peut, sous conditions, bénéficier d’un droit à restitution lors de l’ouverture de ce second usufruit (CGI, art. 1965 B). En effet, ce dernier peut recevoir une somme égale à ce qu’il aurait payé en moins si le droit acquitté par lui avait été calculé d’après l’âge de l’usufruitier successif, par définition plus jeune que l’usufruitier principal 25. Cependant, une réponse ministérielle rendue par le garde des Sceaux26 limite l’application de ce dispositif de faveur au seul cas où le donataire avait lui-même supporté les droits de donation, la restitution à la succession du donateur étant elle aussi exclue. En l’absence de précisions sur ce sujet émanant de la Direction générale des finances publiques, il convient donc, pour l’instant, d’appliquer ce principe contestable et, partant, de considérer que le règlement des droits par le donateur fait échec en toutes hypothèses à l’application de ce mécanisme de restitution. 25 - Ensuite, la prise en charge des droits par le donateur emporte également des conséquences lorsque l’administration fiscale fait application de la présomption de fictivité prévue à l’article 751 du CGI. En effet, lorsqu’une donation de nuepropriété est considérée comme fictive en vertu de ce texte, sa valeur en pleine propriété doit être réintégrée à la succession du disposant et taxée aux droits de succession en conséquence. La donation originelle ayant été elle-même soumise aux droits de donation, la déduction des droits initialement réglés est permise même s’ils avaient été payés par le donateur27.Toutefois, cette prise en compte supposera l’intégration corrélative des droits de donation réglés par le donateur dans sa succession28. Ces droits constituant une créance de ladite succession contre le donataire, ils seront donc assujettis aux droits de succession comme ayant intégré l’actif successoral. Le donateur verra ses droits dans les biens existants réduits d’autant puisque la prise en compte de cette créance implique pour ce dernier le rapport de sa dette. Dans cette hypothèse, l’imputation des droits de donation sur les droits de succession dus par le nu-propriétaire limite donc les lourdes conséquences de la présomption de fictivité pour ce dernier mais leur intégration à l’actif de succession n’est pas neutre en matière de coût successoral global. 26 - Enfin, la prise en charge des droits par le donateur devrait, en toute logique, entraîner des conséquences similaires sur l’application du nouveau dispositif prévu par l’article 774 bis du CGI 29. Dorénavant, le donataire d’une somme d’argent dont le donateur s’était réservé l’usufruit ne peut déduire de l’actif successoral la dette de restitution correspondante. Par conséquent, celui-ci doit supporter des droits de succession sur la créance de restitution. Afin d’éviter une double taxation, les droits de donation initialement réglés sont cependant imputables sur les droits de succession dus. Concernant le cas des droits de donation ayant été pris en charge par le donateur, le texte est muet et les commentaires administratifs non publiés à ce jour. À cet égard, un raisonnement par analogie avec le régime applicable dans le cadre de l’article 751 du CGI devrait conduire à déduire les droits réglés par le donateur tout en imposant leur inscription à l’actif de sa succession en tant que créance contre le donataire, ce qui impliquerait, là encore, la déduction corrélative de celle-ci de la part du donataire30. B. - Une opération généralement source d’économie fiscale 27 - Heureusement, la stratégie tendant à faire prendre en charge les droits par le donateur demeure très souvent pertinente, le fait que les frais dans leur ensemble soient concernés accentuant d’autant l’intérêt de cette solution. 1° Une prise en charge performante dans le cadre de certaines stratégies de transmission 28 - En permettant au donataire de s’enrichir sans avoir à supporter le coût de la donation, la prise en charge des droits par le donateur offre, la plupart du temps, une solution performante pour les parties. Lorsqu’aucune cession ultérieure ou application d’un dispositif spécifique susvisé ne semble avoir vocation à être rencontrée, ce choix se montrera gagnant. La stratégie s’avérera d’autant plus performante que le taux des 22. Le donateur devant être âgé de moins de 80 ans, le donataire devant être âgé de 18 ans révolus ou être émancipé, le don devant être consenti en pleine propriété au profit d’un enfant, d’un petit-enfant, d’un arrière-petit-enfant ou, à défaut d’une telle descendance, d’un neveu ou d’une nièce ou par représentation, d’un petit-neveu ou d’une petite-nièce. 23. Ledit prêt impliquant aussi le dépôt par l’emprunteur d’une déclaration n° 2062 auprès des services fiscaux dont il dépend si la somme prêtée est égale ou supérieure à 5 000 ³(CGI, art. 242 ter. – Et CGI, ann. IV, art. 23 L, 1°). 24. Pour un exemple, V. Cass. 1re civ., 27 janv. 2021, n° 19-17.793. 25. BOI-ENR-DG-70-40, § 10. 26. Rép. min. n° 26892 : JOAN 2 juin 2020, p. 3863 ; Dr. fisc. 2020, n° 37, act. 282, note Fr. Fruleux. 27. BOI-ENR-DMTG-10-10-40-10, § 100. 28. Cass. com., 13 nov. 2003, n° 01-16.358 : Bull. civ. IV, n° 168. – RFN 2004, 1, obs. M. Mathieu. 29. L. fin. n° 2023-1322, 29 déc. 2023, art. 26. 30. Sur ce point, V. H. Leyrat, Le nouveau régime fiscal de la dette de restitution : Defrénois 2024, n° 7, p. 13. 16 LA REVUE FISCALE DU PATRIMOINE N° 6, JUIN 2024
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