œuvre de la dénonciation obligatoire les faits de fraude fiscale prévue par l'article L. 228, I, du LPF. Or, dans l'affaire soumise à la Cour de cassation,s'il existait bien une déclaration rectificative spontanée de la part du contribuable, la cour d'appel ne pouvait juger irrégulière la dénonciation des faits au ministère public alors que l'administration fiscale avait, préalablement à la transmission de cette dénonciation, rejeté la déclaration rectificative. En définitive, pour les faits les plus graves, l'Administration est soumise à une obligation de les dénoncer au procureur de la République sauf si la procédure de transaction avec le contribuable qui a déposé une déclaration rectificative répond aux conditions légales et permet à ce dernier d'éviter les poursuites pour fraude fiscale.Si tel n'est pas le cas, le devoir de dénoncer est maintenu et le procureur dispose de l'opportunité des poursuites. Jean-Yves Marechal professeur de droit pénal à l'université de Lille SOCIÉTÉS 88 Crédit-bail et SCI : levée d'option, transfert de propriété et conséquences fiscale CE, 26 avr. 2024, n° 472855 : Lebon T. La société CMM Finances,soumise à l'impôt sur les sociétés (IS), est associée à hauteur de 95 % de la société civile immobilière (SCI) La Gatine, soumise au régime fiscal prévu à l'article 8 du CGI, qui exerçait une activité de sous-location d'un immeuble nu qu'elle avait pris en crédit-bail. Par acte du 22 avril 2014, la société La Gatine a levé l'option d'achat prévue par le contrat de crédit-bail. À la suite d'un contrôle sur pièce, l'Administration a considéré que l'entrée de l'immeuble dans le patrimoine de la société La Gatine s'était traduite par un changement de nature de son activité, la société cessant d'exercer une activité de sous-location, dont les bénéfices relèvent, lorsqu'ils sont soumis à l'impôt sur le revenu, de la catégorie des bénéfices non commerciaux, au profit d'une activité de location, dont les bénéfices relèvent de la catégorie d'imposition des revenus fonciers. Elle a estimé que la cessation de l'activité initiale de la société La Gatine et son changement de régime fiscal avaient eu pour effet de rendre immédiatement imposable la plus-value correspondant à la différence entre la valeur réelle de l'immeuble et son coût d'acquisition. L'Administration a en conséquence rehaussé les bénéfices de la société CMM Finances à hauteur de la fraction de cette plus-value correspondant à sa quote-part des résultats de la société La Gatine et l'a assujettie en conséquence à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de son exercice clos le 31 décembre 2014. La société CMM Finances a formé un pourvoi contre l'arrêt du 9 février 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles avait rejeté l'appel qu'elle avait formé contre le jugement du 15 septembre 2020 du tribunal administratif d'Orléans rejetant sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires. Selon les termes de l'article 218 bis du CGI, il résulte que les éventuelles conséquences fiscales qui s'attachent au transfert de propriété résultant de la levée de l'option d'achat d'un contrat de crédit-bail par une société relevant du régime fiscal prévu à l'article 8 du CGI doivent s'apprécier, pour les associés patrimoniaux de cette société, en appliquant les règles relatives à la catégorie d'imposition correspondant à l'activité de la société et, pour ses associés soumis à l'IS, en appliquant les règles relatives aux bénéfices industriels et commerciaux. Pour rejeter l'appel de la société CMM Finances, la cour administrative d'appel s'était fondée, comme l'administration fiscale avant elle,sur ce que la société La Gatine, soumise au régime fiscal prévu à l'article 8 du CGI, qui exerçait une activité de sous-location d'immeuble nu pris en crédit-bail dont les bénéfices relevaient de la catégorie des bénéfices non commerciaux,avait cessé cette activité du fait de l'entrée de cet immeuble dans son patrimoine à la suite de la levée d'option d'achat prévue par le contrat de crédit-bail au profit d'une activité de location du même immeuble, dont les bénéfices relevaient de la catégorie des revenus fonciers, ce qui avait eu pour effet de rendre immédiatement taxable, entre les mains de chacun de ses associés, à hauteur de leur quote-part respective, la plusvalue correspondant à la différence entre la valeur réelle de cet immeuble et son coût d'acquisition. Le Conseil d'État annule l'arrêt d'appel. En statuant ainsi,alors qu'il résulte que,dès lors que la société CMM finances est soumise à l'IS, c'est au regard des règles applicables aux bénéfices industriels et commerciaux que la cour aurait dû apprécier les éventuelles conséquences fiscales du transfert de propriété résultant de la levée d'option d'achat du contrat de crédit-bail. TAXES DIVERSES 89 Taxe sur la valeur vénale des immeubles : un actionnariat réel Cass. com., 10 mai 2024, n° 21-11.230, publié au Bulletin : JurisData n° 2024-007386 Les actionnaires, associés ou autres membres, dont la déclaration de l'identité et de l'adresse fait partie des conditions d'exonération de la taxe sur la valeur vénale des immeubles (CGI, art. 990 D et 990 E, 3°, d et e), sont les bénéficiaires économiques réels des actions, parts ou autres droits,et non des bénéficiaires éventuels. La taxe sur la valeur vénale des immeubles est due par toutes les personnes morales, organismes, fiducies ou institutions, qui possèdent des immeubles en France (CGI,art. 990 D).Des exonérations sont prévues, qui concernent notamment ces personnes et organismes s'ils déclarent chaque année à l'administration fiscale en particulier l'identité et l'adresse des actionnaires, associés ou autres membres qui détiennent plus de 1 % des actions, parts ou autres droits (CGI, art. 990 E, 3°, d et e). L'actionnariat ainsi déclaré doit correspondre à une réalité économique dont la preuve doit être apportée par la personne morale redevable (Cass. com., 12 oct. 2022, n° 20-14.073 : JurisData n° 2022-016639 ; Bull. civ. IV ; Dr. fisc. 2022, n° 42, act. 390). Il doit s'agir, comme l'énonce le présent arrêt, des bénéficiaires économiques réels des droits en cause, et non des bénéficiaires éventuels. Dans l'affaire aujourd'hui jugée, le redevable de la taxe était une fondation qui, par nature, n'a pas d'associés, ni d'autres membres, constate la cour.Elle était donc dans l'incapacité de désigner,pour chaque année,un bénéficiaire actuel. Le bénéficiaire futur de son patrimoine n'était qu'hypothétique et l'ancienneté de sa désignation ne lui conférait pas la réalité économique exigée. Lucienne Erstein conseiller d'État honoraire 10 LA REVUE FISCALE DU PATRIMOINE N° 6, JUIN 2024
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