Legs et Donations 2025

- 24 - LE GUIDE DES ASSOCIATIONS & FONDATIONS 2025 Assurance - Assurance vie - Assurance décès - Clause bénéficiaire Assurance - Assurance vie - Souscripteur - Assuré Assurance - Assurance vie - Héritier - Conjoint survivant Assurance - Assurance vie - Preuve - Optimisation fiscale 2 - En près de deux siècles, la loi a fait évoluer la place de la personne protégée dans la société. Alors qu’en 1838, la loi s’intéressait aux personnes dites aliénées en raison d’une incapacité totale avec la création des asiles4, elle fait désormais référence aux personnes qui sont dans l'impossibilité de pourvoir seules à leurs intérêts en raison d’une altération de leurs facultés mentales ou corporelles de nature à empêcher l'expression de leur volonté. L’évolution la plus marquante a sûrement été celle apportée par la loi du 3 janvier 1968. Afin de préserver le principe de liberté individuelle, cette loi a défini, d’une part, les trois régimes de protection que nous utilisons aujourd’hui, tutelle, curatelle et sauvegarde de justice et, d’autre part, mis fin à la systématisation du régime d’incapacité totale précédemment en vigueur5. Ces dispositions concernaient aussi bien les majeurs dont les facultés personnelles étaient altérées que ceux souffrant de prodigalité, d’intempérance ou d’oisiveté. À partir des années quatre-vingt-dix, la philosophie des mesures de protection change notamment sous l’influence européenne. En 2007, on a remplacé les termes de malades mentaux et d’incapables par le terme de majeur protégé et reconnu pour finalité aussi bien la protection de la personne même du majeur que celle de ses biens. 3 - Revenir en 2024 sur 30 ans de protection des majeurs nous invite donc à repartir des années quatre-vingt-dix et ainsi s’intéresser à l’évolution des mesures de protections des majeurs pour mieux en percevoir les orientations à venir. Trois temps semblent marquer cette période. D’abord, celui du changement de paradigme voulu en 2007 qui recentre les trois mesures judiciaires autour des difficultés médicalement constatées et qui vient également créer une nouvelle mesure non judiciaire. Ensuite, celui de la revalorisation de la place de la famille, expression des valeurs de solidarisme et d’humanisme qui vont animer les réformes successives. Enfin, celui de l’autonomie, conduisant les acteurs de la protection à réfléchir au difficile équilibre entre autonomie et protection. 1. Le temps du changement : la nécessité médicale consacrée 4 - Avant la réforme de 2007, deux lois encadraient la protection des majeurs vulnérables. D’une part, la loi du 3 janvier 1968 qui a défini et organisé les mesures de protection juridique, d’autre part, la loi du 18 octobre 1966 qui a instauré, au sein du Code de la sécurité sociale, la tutelle aux prestations sociales versées pour les adultes6. À l’origine, selon les prévisions du législateur, les textes n’auraient dû concerner que quelques milliers de personnes. Or, les diverses études menées au cours des années quatrevingt-dix ont montré les dérives progressives du régime de protection des majeurs et son incapacité à répondre aux besoins croissants des personnes vulnérables. Selon les prévisions de l’Institut national d’études démographiques de l’époque, le nombre de personnes protégées devait passer à 800 000 en 2010. Par ailleurs, le constat a été fait de ce que la protection 4 Loi Esquirol, 30 juin 1838, sur les aliénés. 5 L. n° 68-5, 3 janv. 1968, portant réforme du droit des incapables majeurs : JO 4 janv. 1968. 6 L. n° 66-774, 18 oct. 1966, relative à la tutelle aux prestations sociales : JO 19 oct. 1966. 7 Discours du ministre de la Justice devant le Conseil Économique et Social, 26 sept. 2006. 8 L. n° 2007-308, 5 mars 2007, portant réforme de la protection juridique des majeurs : JO 7 mars 2007, texte n° 12. 9 CEDH, 6 juill. 2023, n° 46412/21, Calvi et CG c/ Italie : JurisData n° 2023-010890 ; Dr. famille 2023, comm. 158, note L. Mauger-Vielpeau ; JCP G 2024, doctr. 33, § 15, obs. F. Sudre. 10 CEDH, 6 juill. 2023, n° 46412/21, § 90 11 CEDH, 6 juill. 2023, n° 46412/21, § 108. 12 CEDH, 6 juill. 2023, n° 46412/21, § 109. judiciaire des majeurs s’était écartée de sa finalité première. En effet, de nombreuses mesures de protection juridique ont été prononcées à des fins d’accompagnement social, sans considération d’une quelconque altération des facultés de la personne. Les mesures se sont alors avérées inefficaces et injustifiées, en ce qu’elles conduisaient à restreindre sans raison les droits des majeurs vulnérables. Le dispositif devrait donc être revu. La réforme initiée dans les années 2000 a ainsi eu pour objectif de « tracer une ligne de partage claire entre les mesures de protection juridique et les systèmes d’aide et d’action sociale, de rendre efficace chaque dispositif, et d’apporter à chaque personne la protection ou l’aide qui lui est nécessaire et adaptée »7. 5 - À cet égard, la loi du 5 mars 20078 est venue recentrer la protection juridique sur les personnes atteintes d’une altération effective de leurs facultés mentales ou corporelles. L’article 425 qui débute la section concernant les dispositions générales relatives aux mesures de protection juridique des majeurs vient ainsi poser le principe selon lequel « Toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté peut bénéficier d’une mesure de protection juridique ». Cette obligation n’a pas cessé depuis lors d’être réaffirmée. EXEMPLE  Encore récemment, la Cour européenne des droits de l’homme a rappelé que « la décision de placer une personne sous une mesure de protection juridique peut constituer une ingérence dans la vie privée de la personne (…) dès lors, le prononcé d’une mesure de protection privant la personne de sa capacité juridique doit être réservé à des circonstances exceptionnelles »9. Or, en l’espère, la Cour note que la décision de placer le requérant sous mesure de protection ne reposait pas sur un constat d’altération de ses facultés mentales mais « sur une prodigalité excessive et sur l’affaiblissement physique et psychique »10. Elle conclut que « dans le cas d’espèce, si l’ingérence poursuivait le but légitime de protéger le bien-être au sens large du deuxième requérant, elle n’était toutefois, au regard de l’éventail des mesures que les autorités pouvaient prendre, ni proportionnée ni adaptée à sa situation individuelle. Dès lors, l’ingérence n’est pas demeurée dans les limites de la marge d’appréciation dont les autorités judiciaires jouissaient en l’espèce »11. Au regard de ces circonstances, la Cour a conclu à la violation de l’article 8 de la convention12. 6 - Par ailleurs, la loi de 2007 a souhaité mettre en avant des dispositions protectrices de la volonté individuelle. Pour ce faire, il a été posé en principe la nécessité de prendre des mesures respectueuses des droits

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