HORS-SERIE_La revue fiscale du patrimoine

10 ASSURANCE-VIE 7. - Ainsi, après avoir analysé la summa divisio des actes (actes de disposition/actes d’administration) qui conditionne le chemin d’appréciation de l’assureur dans ses analyses, nous verrons quelles conséquences en découlent en fonction des différents régimes de protection. Nous analyserons ensuite les précautions à prendre en termes d’investissement, l’actualité de la thématique du majeur protégé à travers trois évolutions paradigmatiques, avant de conclure par le tropisme de la clause bénéficiaire confronté à la problématique du conflit d’intérêts. 1. La summa divisio : distinction actes de disposition/actes d’administration 8. - La qualification entraîne l’application du régime adéquat de faisabilité. Ainsi l’étude du régime des actes de disposition et d’administration nécessite de s’appesantir sur leurs différences pour ensuite s’atteler aux capacités à faire du majeur. 9. - En matière de majeur protégé, l’assureur se réfère à l’alinéa 3 de l’article 496 du Code civil qui renvoie au décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008 relatif aux actes de gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en tutelle. Une véritable bible d’enseignements avec des annexes bienvenues qui encadre la question clef : dans quelle mesure un majeur faisant l’opération d’une mesure de protection pourra réaliser tel ou tel acte ? Les annexes 1 et 2 de ce décret se présentent sous forme de tableaux qui détaillent les actes considérés comme des actes d’administration ou de disposition. Le décret susmentionné définit les actes d’administration comme « des actes d’exploitation ou de mise en valeur du patrimoine de la personne protégée dénués de risque anormal. » Selon ce même décret, les actes de disposition sont des « actes qui engagent le patrimoine de la personne protégée, pour le présent ou l'avenir, par une modification importante de son contenu, une dépréciation significative de sa valeur en capital ou une altération durable des prérogatives de son titulaire ». En ce qui concerne la classification des actes réalisables en matière d’assurance-vie et/ou de capitalisation, le décret est assez limpide. Quasiment toutes les opérations sont considérées comme des actes de disposition. Seule l’acceptation d’une clause bénéficiaire dénuée de toute charge est classée en tant qu’acte d’administration. Toutes les autres opérations : souscription, rachat, versement complémentaire, désignation bénéficiaire, demande d’avance, mise en garantie… sont donc des actes de disposition. 4 Afférent aux retraits sur les comptes bancaires : Cass. 2e civ., 5 juin 2008, n° 07-14.077. 5 Michel Leroy, Appréciation de la classification des actes en droit de l’assurance vie, Dr & patr., nov. 2016, dossier, n° 263, p. 64. 6 Ces mesures de protection ont des durées variées, que l’assureur devra vérifier avant tout acte impliquant un contrat d’assurance-vie et/ou de capitalisation. 2. Quid des arbitrages qui ne sont pas expressément visés au sein d’un contrat ? 10. - D’aucuns considèrent que les principes afférents à la gestion d’un portefeuille titres sont transposables à la gestion d’un contrat d’assurance-vie mais la spécificité du contrat d’assurance empêche cette assimilation qui n’est d’ailleurs pas corroborée par la jurisprudence4. Est-ce que le législateur a souhaité englober les opérations d’arbitrage dans les actes liés aux instruments financiers ? Dans une hypothèse affirmative, une opération d’arbitrage serait à qualifier en tant qu’acte d’administration. Le décret y inclut en effet les « actes de gestion d'un portefeuille, y compris les cessions de titres à condition qu'elles soient suivies de leur remplacement . » 11. - Toutefois, le décret prévoit expressément qu’il fait référence aux instruments financiers au sens de l’article L. 211-1 du Code monétaire et financier. Aucun renvoi n’est effectué vers le Code des assurances qui définit ce droit d’arbitrage et régit les contrats d’assurance-vie et de capitalisation. L’idée d’associer une opération d’arbitrage à un acte de gestion d’un portefeuille telle que précédemment mentionné ne peut donc être confirmée sans risque de contestation. 12. - En pratique, les compagnies d’assurances ont tendance à considérer qu’un arbitrage du fonds en euros (fonds à capital garanti) vers un support en unité de compte est un acte de disposition. À l’inverse un arbitrage d’un support en unité de compte vers le fonds en euros serait un acte d’administration. Ce dernier acte serait un acte « dénué de risque anormal » au sens du décret. Le débat est posé sur la qualification du terme de risque anormal. 13. - Certains auteurs avancent un principe de cohérence qui assimilerait l’arbitrage à un acte de disposition, même en cas d’arbitrage vers le fonds en euros5. Ces auteurs précisent avec pertinence que la souscription d’un contrat d’assurance-vie mono-support en euros est un acte de disposition. Dans ce cadre, le principe de cohérence assimilant le principal et l’accessoire exigerait une seule et même qualification. Les pratiques des compagnies ne sont donc pas uniformes sur cette question et nous conseillons vivement de documenter la position. 14. - Comme nous l’avons précédemment mentionné, cette distinction entre un acte d’administration et de disposition emporte des conséquences qui varieront en fonction des degrés de protection6 . 3. Impact de la summa divisio avec la gradation des mesures : de la plus légère à la plus lourde A. - La sauvegarde de justice 15. - La sauvegarde de justice est une mesure peu contraignante, sauf si un mandataire spécial a été désigné afin de réaliser des actes déterminés. La personne sous sauvegarde de justice conserve l’exercice de ses droits (C. civ., art. 435). Ainsi, la personne ayant été placée sous sauvegarde pourra souscrire librement un contrat d’assurance-vie et effectuer les opérations de

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