HORS-SERIE_La revue fiscale du patrimoine

9 ASSURANCE-VIE En présence de majeurs protégés, l’assureur se doit de connaître parfaitement les enjeux juridiques et financiers qui vont guider son analyse basée également sur un travail collaboratif avec les conseillers en charge d’une approche holistique et protectrice de cette clientèle dite « vulnérable ». 1. - Sauvegarde de justice, curatelle, tutelle, habilitation familiale et entre époux, mandat de protection future… autant de terminologies qui ont pénétré le langage commun et n’appartiennent plus seulement au vocabulaire vernaculaire de la gestion de patrimoine ; des mesures désormais essentiellement prononcées par le juge des contentieux de la protection, magistrat qui s’est vu attribuer les compétences du juge des tutelles liées aux majeurs protégés depuis le 1er janvier 20201. Passer d’une dénomination « tutelle » à celle d’un contentieux de la protection n’est évidemment pas neutre dans la sémantique de cette nouvelle dénomination et illustre la sensibilité du sujet. 2. - Les derniers chiffres de l’INSEE sont éloquents : une femme née en 2022 a une espérance de vie de 93 ans et un homme de 90 ans… Maladie, population vieillissante et accidents de la vie, sources majeures de vulnérabilité, exigent la nécessité du prisme d’un temps long via le truchement des réceptacles adaptés de l’épargne, et corrélativement justifient la place de choix de l’assurance-vie : produit banalisé par son succès mais pas banal par ses qualités juridiques et fiscales cumulatives en cas de vie ou en cas de décès. 3. - Nonobstant l’intérêt du produit d’assurance qualifié de couteau suisse de par son adaptation darwinnienne à quasi toutes les situations, les compagnies d’assurance devront être particulièrement vigilantes en maîtrisant les enjeux juridiques, réglementaires mais aussi réputationnels de la gestion de patrimoine des majeurs faisant l’objet d’une mesure de protection. Ndlr : Cette étude fait partie d'un dossier sur le majeur protégé. Elle a été publiée dans la revue Actes pratiques et stratégie patrimoniale 2023, n° 1, dossier 8. 1 En matière de mineurs protégés, les fonctions du juge des tutelles sont exercées par le juge aux affaires familiales (COJ, art. L. 213-3-1). 2 C. pén., art. 434-3. – Et Procès Barbarin, article 434-3 et interprétation stricte de la loi pénale, par Henri deBeauregard, 2019. 3 La commercialisation des produits financiers aux personnes âgées vulnérables : ACPR/AMF, avr. 2021. Et ce, d’autant que le sujet est sensible pour les autorités de contrôle. Qui sont les personnes visées ? 4. - La référence est l’article 434-3 du Code pénal. Ce dernier définit un majeur vulnérable comme étant « une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique ou d'un état de grossesse »2. L’article 425 du Code civil définit pour sa part les majeurs protégés comme « toute personne dans l'impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d'une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l'expression de sa volonté » et qui fait l’objet d’une mesure de protection. À la lecture de ces deux définitions, il ressort que les majeurs protégés sont donc une catégorie sous-jacente de majeurs vulnérables. Or, la vulnérabilité peut être temporaire ou insoupçonnable et sujette à des abus de malveillance ; c’est la raison pour laquelle les placements sur les contrats d’assurance-vie nécessitent une vigilance particulière (C. assur., art. L. 132 4-1). 5. - Dans le cadre d’une enquête réalisée conjointement par l’ACPR et l’AMF, le pôle commun a publié ses travaux menés avec des professionnels de la gestion de patrimoine. Ce rapport pointe avec précision les enjeux liés la conception et à la conformité des produits. Conscient des défis d’aujourd’hui et de demain, le pôle commun présente des recommandations sur les stratégies de distribution et de digitalisation en présence d’une population dite « vulnérable », le plus souvent sujette à l’isolement et qui a difficilement accès aux outils numériques3. 6. - On sait très bien en qualité de professionnels de la gestion de patrimoine que ces recommandations seront suivies d’effet et donc faisons nôtre cette maxime pour illustrer notre article : ne pas prévoir c’est déjà gémir (Léonard de Vinci). La transmission du patrimoine protégé Laurent GAYET, directeur général adjoint AXA Wealth Europe Arnaud MASSOT, ingénieur patrimonial AXA Wealth Europe © Droits réservés © Droits réservés

RkJQdWJsaXNoZXIy MTQxNjY=