PRODUITS FINANCIERS 60 b) Les titres de droit commun Le recours aux instruments de capital de droit commun restant inhérent aux management packages , la réflexion doit également porter sur les ajustements susceptibles d’intervenir sur ce volet. Les décisions rendues sous le nouvel environnement fiscal concernent principalement des BSA, instrument qui n’est plus – ou marginalement – utilisé comme support des management packages depuis plusieurs années. Le raisonnement appliqué reste toutefois transposable aux autres catégories de titres, sous réserve des spécificités propres à chacune. Depuis plusieurs années, les actions de préférence (AP) comptent parmi les principaux outils de structuration des management packages , notamment à visée de co-investissement. Fondamentalement les AP organisent des droits ou des obligations particuliers attachés au titre et non au porteur. Le recours aux AP se distingue en particulier en présence de schémas fondés sur une mécanique de partage ou de rétrocession de la plus-value de sortie réalisée par les investisseurs professionnels. En pratique, la préférence des AP épouse alors deux figures : • les AP-waterfall : elles organisent une appréhension inégalitaire du produit de cession à la sortie entre les catégories d’actions ; ce schéma, qui extériorise des prix de sortie différenciés entre les catégories d’actions et donc leurs porteurs respectifs, ne nous paraît pas pleinement satisfaisant car potentiellement perméable à la caractérisation d’indicateurs de requalification ; • les AP convertibles en actions : elles aménagent en quelque sorte un mécanisme de ratchet positif ou négatif à la sortie, les statuts arrêtant l’ensemble des modalités selon lesquelles les AP convertibles, à la sortie, se convertiront de plein droit en un nombre inférieur, égal ou supérieur d’actions ordinaires (V. Actes prat. ing. sociétaire 2018, n° 161, dossier 5). Il s’agit, un instant de raison avant la sortie, de diluer ou de reluer les porteurs d’actions ordinaires (AO) convertibles selon qu’ils ont vocation à appréhender une quote-part du produit global de sortie inférieure ou supérieure à la participation représentée par les AP convertibles avant conversion. Les AP convertibles présentent deux atouts au regard du risque de requalification : • la convertibilité constitue l’une des caractéristiques des AP expressément consacrée par le Code de commerce (C. com., art. L. 228-12, I, L. 228-14 et L. 228-15) ; • elles peuvent être exclusivement détenues par les investisseurs appelés à partager ou rétrocéder une quote-part de la plus-value de sortie, les managers et les autres actionnaires restant détenteurs d’actions ordinaires ; la conversion intervient alors selon une parité inférieure à 1 emportant dilution des investisseurs et relution des autres actionnaires (dont les managers). C’est pourquoi il est préférable, lorsque l’actionnariat n’est pas limité aux investisseurs et aux managers bénéficiaires du management package, d’adopter un schéma de partage que de rétrocession de la plus-value de sortie : un schéma de rétrocession nécessiterait en effet, afin de limiter l’effet relutif consécutif à la conversion des AP des investisseurs (parité inférieure à 1), la création d’une seconde catégorie d’AO convertibles (parité supérieure à 1). Par ailleurs, en présence d’une équipe réduite de managers (compte tenu de l’impossibilité d’individualiser les conditions de déclenchement du rachat au sein d’une même catégorie (infra)), les leavers pourront prendre la forme d’AP convertibles ou d’AO rachetables, les modalités du leaver étant alors inscrites ab initio dans le titre lui-même (V. Actes prat. ing. sociétaire 2019, n° 168, dossier 17, préc.). En toute hypothèse, le recours aux AP comme support de management packages doit éviter deux écueils, susceptibles de favoriser l’émergence d’indicateurs de requalification. Tout d’abord, les actions de préférence de droit français, bien qu’inspirées des preferred shares, n’en sont pas et relèvent, au plan juridique, d’une logique différente. En particulier, les AP confèrent des « droits particuliers identiques par catégorie » (C. com., art. L. 228-1), ce qui impose que tous les porteurs d’une même catégorie d’AP disposent rigoureusement, pendant toute la durée de vie des AP, des mêmes droits particuliers, nonobstant un éventuel transfert desdites AP à un tiers. Il n’est dès lors pas possible de faire varier les caractéristiques des AP en fonction de l’identité des porteurs, ni de lier ces caractéristiques à l’identité du porteur. S’agissant des AP convertibles ou rachetables, le déclenchement de la conversion ou du rachat devra concerner la totalité des AP de la même catégorie et reposer sur des critères impersonnels. Ensuite, une évaluation indépendante des AP, justifiant du prix de leur souscription retenu au regard des droits – positifs et/ou négatifs – y attachés, reste indispensable même si elle n’est plus suffisante. Enfin, en cas d’AP à préférences négatives, il convient de veiller à ce que ces préférences, en soi ou par leur cumul, ne dénaturent pas excessivement les prérogatives usuelles d’associés des managers ou, à tout le moins, des seuls managers (actions sans droit de vote, gloden share au profit des investisseurs, etc.). Autant d’outils parmi d’autres qui, quelque peu repensés et utilisés à bon escient, peuvent contribuer à dépressuriser les management packages !
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