Actes Pratiques et Stratégie Patrimoniales

Le présomptif héritier qui aurait été omis dispose donc uniquement de l'action en réduction pour atteinte à sa réserve, s'il est réservataire1. 5 - Le donateur doit avoir la capacité de donner (être sain d'esprit et disposer des pouvoirs et autorisations nécessaires au regard de son régime matrimonial notamment) à la date de la signature de l'acte de donation-partage, ou, dans le cas d'une acceptation postérieure par acte séparé, à la date de ce dernier acte. La capacité des parties sera envisagée dans l'étude suivante, au gré des causes de nullité de la donation-partage2. B. - Les conditions et les effets 1° Les conditions 6 - Laforme.–La donation-partage doit en principe (on réserve la question des dons manuels) être établie en la forme authentique, c'est-à-dire par acte notarié, conformément aux dispositions des articles 1075, alinéa 2 et 931 du Code civil, ce qui a été rappelé par la jurisprudence3. Le formalisme proprement dit sera abordé et plus amplement détaillé dans une étude ultérieure. 7 - L'acceptation. – La donation-partage et son acceptation peuvent être établies en un seul et même acte, ce qui est le cas le plus courant, mais elles peuvent également être établies en deux actes séparés. Dans ce dernier cas, l'acceptation fait l'objet d'un acte authentique ultérieur, notifié au donateur à moins que celui-ci n'intervienne à ce second acte(C. civ., art. 932). Remarque : À ne pas confondre avec la donation-partage réalisée aux termes d'un premier acte contenant uniquement la donation, mais acceptée immédiatement, et un second acte constituant le partage. 8 - L'objet. – La donation-partage doit porter sur des biens présents, c'est-à-dire des biens dont le donateur est propriétaire au jour de la donation. La donation ne peut donc pas avoir pour objet des biens à venir, que seul un testament-partage peut contenir (C. civ., art. 1076). La libéralité peut donc être constituée de biens personnels ou propres au donateur, de biens communs, ou encore de droits dont ils disposent dans une masse indivise. 9 - La donation-partage peut aussi être l'occasion de réincorporer des donations antérieures, voire, de ne porter exclusivement que sur des donations antérieures (C. civ., art. 1078-1) 4. La réincorporation peut contenir des donations simples établies par acte notarié ou par voie de dons manuels, déclarés ou non (auquel cas cela fera l'objet d'une révélation), ou bien encore d'une précédente donation-partage. Ceci permettra non seulement d'équilibrer les lots de chaque donataire en tenant compte des donations déjà reçues, mais également de procéder le cas échéant à une modification tant des attributions que du caractère de ces transmissions antérieures (notamment transformer une donation hors part successorale en donation en avancement de part successorale). 10 - Les attributions. – La donation-partage a pour but de procéder à une répartition anticipée des biens du donateur : ce dernier doit non seulement donner mais également partager ses biens, et opérer une division entre les donataires pour les allotir (C. civ., art. 1075). Ces deux modalités peuvent résulter d'un seul et même acte, ou de deux actes séparés, mais dans ce dernier cas, il est essentiel que le donateur intervienne à chacun des actes car le partage doit se faire sous son autorité. 11 - Le donateur peut constituer des lots inégaux, qu'il s'agisse d'une inégalité en nature ou d'une inégalité en valeur : l'égalité entre les donataires n'est pas d'ordre public et seule la réserve sera contrôlée lors du règlement de la succession du donateur. 12 - Les clauses usuelles et particulières. –Aux fins d'adapter la transmission aux souhaits du donateur, des conditions peuvent être stipulées à l'acte de donation-partage. Traditionnellement, le donateur peut vouloir conserver une certaine maitrise sur le patrimoine familial objet de la transmission, à travers l'insertion de clauses d'exclusion de communauté, d'obligation d'emploi ou encore d'inaliénabilité. Certaines stipulations nécessitent toutefois d'être reconsidérées ou du moins explicitées, eu égard à leur portée5. Plus spécifiquement, lorsque la donation-partage a pour objet des titres sociaux, des clauses particulières pourront être envisagées, liées notamment au caractère familial de l'entreprise6. 2° Les effets 13 - La donation-partage a pour conséquence un transfert de propriété du bien donné, immédiat et irrévocable. 14 - La donation-partage n'est pas soumise au rapport à la succession du donateur car le rapport est préalable à la constitution d'une masse à partager, or, au moyen de la donationpartage, le partage est fait. De même, elle n'est pas soumise à l'action en complément de part pour cause de lésion(C. civ., art. 1075-3). L'héritier réservataire qui ne serait pas intervenu à la donationpartage, ou qui aurait reçu un lot largement inférieur, dispose uniquement de l'action en réduction. Attention : Il faut noter que l'héritier non conçu lors de la donation dispose, sur la base des dispositions de l'article 1077-2 du Code civil, d'une action spéciale pour composer sa part héréditaire, et non uniquement sa part de réserve comme dans le cas d'un enfant n'ayant pas concouru. 15 - Le principal atout recherché de la donation-partage réside dans la fixité des valeurs. Sauf convention contraire, les biens sont évalués au jour de la donation-partage pour l'établissement de la masse de calcul de la réserve et de la quotité disponible, ainsi que pour l'imputation des libéralités (C. civ., art. 1078). Pour cela il est nécessaire : ‰ que tous les héritiers réservataires interviennent à la donation-partage afin d'y recevoir un lot (peu importe qu'il y ait ou non égalité entre les donataires) ; ‰qu'il n'y ait pas de réserve d'usufruit portant sur une somme d'argent. Dans la plupart des cas, la donation-partage offre ainsi une grande stabilité de la transmission opérée et une pérennité de l'égalité et des allotissements constatés, qui ne pourront être remis en cause. 1. Cass.1re civ., 4 nov. 1981 : JCP N 1982, prat. 84-31. Et Cass. 1re civ., 16 juill. 1997 : Bull. civ. I, n° 252 ; JCP N 1997, II, p. 1509, n° 49. 2. V. infra, La remise en cause de la donation-partage : Actes prat. strat. patrimoniale 2023, n° 3, dossier 20. 3. Not. Cass. 1re civ.,1er déc. 1999, n° 97-21.953 : JurisData n° 1999-004180 ; JCP N 2000, n° 51-52, p. 1844. 4. V. infra, La nature de l'incorporation : Actes prat. strat. patrimoniale 2023, n° 3, dossier 21, et Les intérêts multiples de l'incorporation : Actes prat. strat. patrimoniale 2023, n° 3, dossier 22. 5. M. Grimaldi et C. Vernières, De quelques clauses des donations-partages : Defrénois n° 7, p. 386. 6. A titre illustratif, un droit de préférence peut être stipulé au profit du donateur et/ou au profit des donataires si l'un d'eux décidait d'aliéner sa participation : F.-.B. Godin, La transmission de l' entreprise à titre gratuit et entre vifs dans le cercle familial : aspects civils : Actes prat. strat. patrimoniale 2023, n° 3, dossier 21. 7 ACTES PRATIQUES & STRATÉGIE PATRIMONIALE - N° 3 - JUILLET-AOÛT-SEPTEMBRE 2023 - © LEXISNEXISSA Dossier

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