nouvelles informations sur les entités établies au sein de l'Union européenne. Confirmation du dispositif. – Malgré ces critiques, le Parlement européen a approuvé le principe et les modalités du nouveau dispositif contre les entités écrans. Tout comme la Commission européenne, les parlementaires ont considéré que les mesures existantes ne ciblaient pas spécifiquement les entités écrans situées dans l'Union européenne. Certains professionnels ont, d'ailleurs, fait valoir que l'essentiel des entités écrans impliquées dans les récents scandales fiscaux (pour les seules affaires médiatisées récemment, on peut citer les « Panama Papers » ou les « Pandora Papers ») étaient situés en dehors du territoire de l'Union européenne (une autre proposition de directive était annoncée courant 2022 pour les entités écrans situées hors de l'UE. À notre connaissance, ce projet serait publié courant 2023 et compris dans une nouvelle initiative de la Commission européenne, dite « SAFE » [« Securing the Activity Framework of Enablers »]). Dispositif en trois étapes. – Pour rappel, la directive prévoit que le dispositif fonctionnerait selon le triptyque suivant : ‰ l'entité doit, tout d'abord, déterminer si elle entre dans le champ d'application du dispositif (entités « à risque »), ou démontrer qu'elle peut bénéficier d'une exemption déclarative, et doit, le cas échéant, remplir une déclaration annuelle ; ‰ dans le cadre de cette obligation déclarative, l'entité doit ensuite démontrer qu'elle remplit les indicateurs de substance minimale ; ‰ l'entité peut encore renverser la présomption d'entité écran en mettant en évidence sa substance économique. Conséquences de la qualification d'entité écran. – Les effets de la qualification d'entité écran demeurent également inchangés. Dès lors que l'entité ne passe pas les trois étapes décrites supra, celle-ci perdra la qualité de résidente d'un des États membres de l'Union européenne qui lui refuserait alors la délivrance d'un certificat de résidence fiscale (dans la proposition initiale, les États membres auraient pu délivrer un certificat de résidence fiscale indiquant toutefois que l'entité n'a pas droit à certains avantages. Le Parlement européen a supprimé cette possibilité). Les effets fiscaux de l’interposition de l’entité écran au sein de l’État de résidence seraient les suivants : ‰ l'entité écran serait privée du bénéfice des avantages fiscaux octroyés par les conventions fiscales internationales conclues entre États membres, ainsi que de l’exonération de retenue à la source prévue par la directive mères-filles et la directive relative aux intérêts et aux redevances (les exigences de substance économique jouent désormais un nouveau rôle en matière fiscale en intégrant un critère de lien économique ; sont donc exclues du bénéfice des diminutions ou exonérations de retenue à la source les entités écrans établies dans un États membre sans exercer une réelle activité économique dans cet État. Ce changement découle d'un arrêt rendu par la CJUE en 2019 dans les affaires dites « danoises »en matière de retenues à la source (CJUE, 26 févr. 2019, aff. C-116/16 et C-117/16, Skatteministeriet c/ T Danmark et Y Denmark Aps). La CJUE a jugé que la notion de bénéficiaire effectif pouvait constituer un fondement autonome de refus d'une exonération de retenue à la source (concernant par exemple la directive mères-filles ou la directive relative aux intérêts et redevances), dès lors que le bénéficiaire effectif a sa résidence fiscale dans un État tiers et sans avoir à caractériser d'abus de droit. Le Conseil d'État a fait sienne cette solution (CE, 5 févr. 2021, n° 430594, Sté Performing Right Society Ltd). Plus récemment encore, la cour administrative d'appel de Paris a remis en cause la qualité de bénéficiaire effectif par la caractérisation d'une société écran: « la circonstance qu’une société agit comme société relais peut être considérée comme établie lorsque celle-ci a pour unique activité la perception des dividendes et la transmission de ceux-ci au bénéficiaire effectif ou à d’autres sociétés relais. L’absence d’activité économique effective doit, à cet égard, à la lumière des spécificités caractérisant l’activité économique en question, être déduite d’une analyse de l’ensemble des éléments pertinents relatifs, notamment, à la gestion de la société, à son bilan comptable, à la structure de ses coûts et aux frais réellement exposés, au personnel qu’elle emploie ainsi qu’aux locaux et à l’équipement dont elle dispose » (CAA Paris, 7 déc. 2022, n° 21PA05986)) ; ‰ l'associé de l'entité écran deviendrait alors imposable directement dans son État de résidence, sans prise en compte de l'interposition de l'entité écran. États tiers. –L'unedes « pierres d'achoppement »est relative à l'application de la directive avec les États tiers à l'Union européenne. Il est, en effet, possible que des phénomènes de double imposition apparaissent (pour davantage de précisions : P. d'Azemar de Fabregues et N. Nezondet, ATAD 3 : proposition de directive du 22 décembre 2021 contre l'utilisation abusive d'entités écrans à des fins fiscales : Actes prat. strat. patrimoniale 2022, n° 2, 2). Sur ce point, le Parlement a ajouté que les États membres devraient communiquer les informations sur les entités écrans présumées aux États tiers qui ont conclu avec eux une convention fiscale internationale afin que les « conséquences fiscales [soient] articulées d'une manière cohérente ». ÉLARGISSEMENT DU CHAMP D'APPLICATION DES ENTITÉS ÉCRANS SOUMISES À L'OBLIGATION DÉCLARATIVE Critères présentés par la Commission européenne. –Dans le projet de la Commission européenne, le champ d'application de la directive est déterminé par trois critères cumulatifs qui s'apprécient au regard des deux derniers exercices. Il s'agit de déterminer les entités « à risque » qui répondent à ces trois critères : ‰ plus de 75 % des recettes de l’entité sont « passifs » ; ‰ l'entité exerce une activité considérée comme « transfrontière »(60 % de ses revenus « passifs »proviennent de l’étranger ou 60 % de la valeur comptable de ses actifs sont situés en dehors de l’État membre) ; ‰ l'entité a externalisé la gestion des opérations courantes et la prise de décision sur des fonctions importantes. Modifications du Parlement. – La Commission des affaires économiques a proposé d'abaisser les seuils du premier et du deuxième critères, de manière à augmenter le nombre d'entités soumises à l'obligation déclarative annuelle : ‰ il suffirait que 65 % des recettes de l'entité considérée soient « passives » ; ‰ il suffirait que 55 % des recettes passives aient un caractère transfrontière. Le troisième critère est lui aussi modifié, puisque l'externalisation de la gestion et de la prise de décision serait définie comme dévolue « à un tiers ». Au sein du texte initial de la Commission européenne, il n'était pas clair si cette condition était remplie lorsque cette externalisation aurait lieu au sein d'un groupe de sociétés. Ainsi, seule la sous-traitance « à un tiers » est visée par le Parlement, ce qui est une clarification pour les groupes de sociétés à la gestion centralisée. © LEXISNEXISSA - ACTES PRATIQUES & STRATÉGIE PATRIMONIALE - N° 3 - JUILLET-AOÛT-SEPTEMBRE 2023 58 Le point sur
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