Actes Pratiques et Stratégie Patrimoniales

usufruit successif au profit de son conjoint, qui sera, dans cette hypothèse, exonéré de droits de succession14. 2. Donations-partages et droit de partage 18 - La donation-partage n'est en principe pas assujettie au droit de partage de 2,5 % car le partage constitue une disposition dépendante de la donation. Cependant, le droit de partage peut être perçu dans les hypothèses suivantes : ‰le partage est effectué par acte séparé de l'acte de donation ; ‰ la donation-partage contient l'incorporation de donations antérieures (et dans les cas autorisés par l'article 776 du CGI) ; ‰ la donation-partage cumulative15. A. - Le partage par acte séparé 19 - Lorsque le partage n'est pas réalisé dans le même acte que la donation, le droit proportionnel de 2,5 % est perçu sur l'acte ultérieur constatant le partage16. 20 - En application de l'article 1076, deuxième alinéa du Code civil (aux termes duquel la donation et le partage peuvent être faits par actes séparés pourvu que le disposant intervienne aux deux actes), l'administration fiscale avait pu antérieurement considérer que si le partage n'intervenait qu'après le décès du donateur, le régime fiscal de faveur issu de l'article 748 du CGI (i.e. l'application du droit de partage et l'absence de taxation des soultes) n'était pas applicable17puisque le disposant originaire étant décédé, il ne pouvait logiquement plus intervenir aux deux actes. Cette considération a été remise en cause par la réponse ministérielle Valleix18 : si le partage intervient postérieurement au décès du donateur entre les indivisaires, ledit régime de faveur est bel et bien applicable. 21 - Quant à la donation-partage avec attribution partielle de quotités indivises, la disqualification opérée par la Cour de cassation19 en donation simple a pu jeter un trouble sur la question du régime fiscal applicable. En effet, l'article 748 du CGI, dans sa rédaction actuelle, vise les « partages portant sur des biens indivis issus d’unedonation-partage ». Néanmoins, la doctrine administrative indique que « l'acte qui se borne à une simple attribution de quotité à chaque donataire, sans division matérielle des biens entre les descendants, est également considéré comme une donation-partage : le droit de partage sera ultérieurement exigible sur l'acte par lequel des donataires procèderont au “ lotissement ”20 ». B. - L'incorporation d'une donation antérieure à une donation-partage 22 - Il y a lieu de distinguer le régime fiscal applicable aux donations-partages traditionnelles consenties aux enfants du donateur de celui des donations-partages transgénérationnelles. 1° Incorporation à une donation-partage consentie à des descendants de même degré 23 - L'incorporation à une donation-partage consentie à des descendants de même degré n'entraîne pas de mutation taxable aux droits de donation, par application de l'article 776 A, alinéa 1er duCGI. Seul le droit proportionnel de partage est exigible sur la valeur de l'actif incorporé, estimé au jour de la donationpartage. Lorsque l'estimation du bien incorporé a pu fluctuer entre la donation d'origine et l'acte de donation-partage incorporative, il y a lieu de liquider le droit de partage sur la valeur vénale arrêtée à la date de l'incorporation. 24 - L'incorporation intervenant entre héritiers présomptifs de même degré relève du droit de partage de l'article 746 du CGI, au taux de 2,5 %. Le droit de partage s'applique lorsque la libéralité incorporée résulte d'une donation simple ou d'une donation-partage. Il en est de même lorsque l'incorporation porte sur le bien originairement donné ou sur un bien subrogé, et lorsque le bien incorporé est attribué au donataire originaire ou à un copartagé21. 25 - Bien entendu, un acte de donation-partage peut avoir pour objet des biens incorporés, assujettis au droit de partage, d'une part, et des biens nouvellement donnés relevant du régime des droits de mutation à titre gratuit, d'autre part. Ledit acte contiendra alors concurremment la liquidation du droit de partage sur les incorporations et la liquidation des droits de mutation pour les biens nouvellement donnés. Conseil pratique : Sous réserve des dispositifs « antiabus »des articles L.64 et L. 64 A du LPF, l'incorporation peut être une source de transferts de biens entre copartagés de même degré, taxables au droit de partage de 2,5 % aux lieu et place des droits de mutation à titre gratuit au taux marginal de 45 %. Ces transferts seraient alors : tantôt directs, à effet immédiat, à l'aune d'une donationpartage inégalitaire constatant l'incorporation d'un bien par un donataire qui serait attribué à un autre donataire de même degré, sans versement de soulte ; tantôt indirects, à effet atermoyé : (i) le changement des caractères d'une donation originaire induit par ricochet un enrichissement des cohéritiers (notamment lorsque la libéralité hors part est in fine consentie en avance de part successorale, la réintégration en valeur ou en nature effectué dans la succession du donateur favorisera une redistribution patrimoniale au jour du décès) ; (ii) la cristallisation, par l'effet du principe de fixité de la donation-partage, de la valeur d'une précédente donation portant sur un bien à plus-value croissante peut causer un avantage au profit de certains cohéritiers ; (iii) l'imputation de la libéralité dans la succession du survivant à l'aune d'une donation-partage conjonctive permet de différer l'exigibilité d'une indemnité de réduction, favorisant un donataire qui thésaurisera dans l'intervalle les fruits d'une dette dont il ne sera pas immédiatement libéré. Outre la fonction répartitrice de l'incorporation, Pierre Catala enseignait déjà que l'incorporation de donations dans une donation-partage pouvait s'accompagner de toutes sortes de modification des dispositions concernées 22. 26 - Le mécanisme de l'incorporation fait écho à la volonté des donateurs de réaliser un bilan des donations passées et mène à la prudence car le régime de l'usufruit per retentionemn'est pas expressément visé. 14. Le constituant étant l'enfant de la génération intermédiaire (G2) et non pas le donateur originaire (G1), l'usufruit per retentionempermet donc d'éviter l'application d'un taux de 60 % entre étrangers, lors de l'ouverture de l'usufruit successif au profit du conjoint survivant. 15. V. n° 8. 16. JOANQ, 1er avr. 1972, p. 754. 17. Instr. 5 févr. 1971 : BODGI 7 F-1-71. 18. Rép. min. Budget : JO 15 août 1994, p. 4152, M. Valleix. 19. Cass. 1re civ., 20 nov. 2013, n° 12-25.681 : JurisData n° 2013-026113. 20. BOI-ENR-DMTG-20-20-10, 12 sept. 2012, § 80. 21. BOIENR-DMTG-20-20-10, 12 sept. 2012, § 180 et 250. 22. P. Catala, préc. (au titre des études 3 et 4 du présent dossier, dédiées au mécanisme de l'incorporation), n° 126 : « La liberté d'action des intéressés est totale. Ils peuvent incorporer au partage toutes les donations antérieures ou seulement certaines d'entre elles. (...) Ils peuvent convenir que des enfants non gratifiés seront allotis par voie de soultes mises à la charge des donataires anciens, sans que l'ascendant contribue à leur paiement. » 46 © LEXISNEXISSA - ACTES PRATIQUES & STRATÉGIE PATRIMONIALE - N° 3 - JUILLET-AOÛT-SEPTEMBRE 2023 Dossier

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