Actes Pratiques et Stratégie Patrimoniales

b) Au profit d'enfants non issus du couple de donateurs 11 - En vertu des dispositions de l'article 1076-1 du Code civil, une donation-partage réalisée conjointement par deux époux permet d'allotir des enfants qui ne sont pas issus de leur union. Le lot attribué à l'enfant non commun peut être composé de biens propres de son auteur, mais également, si les époux sont mariés sous un régime de la communauté, de biens communs. 12 - Dans ce dernier cas il faut être vigilent aux conséquences civiles et fiscales quant à l'allotissement d'un bien commun au profit d'un enfant donataire non commun ; seul l'auteur du descendant doit avoir la qualité de donateur (à charge de récompense au profit de la communauté à sa dissolution5), au risque d'être imposé aux droits de mutation à titre gratuit à concurrence de 60 %. En effet, l'article 778 bis du CGI dispose que « la donation-partage consentie en application de l'article 1076-1 du code civil est soumise au tarif en ligne directe sur l’intégralité de la valeur du bien donné ». Cet article tire ainsi les conséquences fiscales de cette disposition civile et précise que l'intégralité de la valeur du bien commun donné par l'auteur du descendant est soumise au tarif des droits de mutation à titre gratuit prévu en ligne directe. Il n'est alors appliqué qu'un seul abattement. Le barème progressif des droits de mutation à titre gratuit est exploité une fois du chef du parent auteur du gratifié. De même, l'éventuelle réduction de droits applicable est déterminée selon l'âge de l'époux donateur. Conseil pratique : La donation d'un bien par un donateur à un donataire avec lequel il n'a pas de lien de parenté est taxée aux droits de mutation à titre gratuit à concurrence de 60 %. Il en serait ainsi de la gratification de l'enfant issu d'une précédente union de son conjoint. La donation-partage conjonctive d'un bien commun attribué à un enfant non commun du couple de donateurs permet de faire bénéficier de la fiscalité applicable en ligne directe à une mutation entre deux personnes sans lien de parenté. 4° Donations graduelles et résiduelle 13 - La clause graduelle ou résiduelle a pour effet d'opérer à une transmission des biens donnés lors du décès du donataire attributaire au profit d'un second gratifié désigné dans l'acte et ayant accepté la disposition. Au décès du premier gratifié, l’actif transmis est taxé d’après le degré de parenté existant entre le donateur et le second gratifié. Les droits liquidés dans la donation-partage et afférents aux biens concernés par la stipulation graduelle ou résiduelle viennent s'imputer sur les droits dus lors de la mise en œuvre de la clause(CGI, art. 784 C) 6. Ce calcul requiert d'isoler la quote-part de droits de mutation exigibles lors de la donation originaire, relative aux actifs effectivement reçus par le second gratifié en application de la clause graduelle ou résiduelle. Conseil pratique : La stipulation d'une clause résiduelle ou graduelle évite que le prédécès sans descendance du premier gratifié déclenche une transmission successorale parfois coûteuse. Envisageons l'hypothèse d'un donateur (A) désignant : comme premier gratifié son enfant (B) issu de sa première union ; comme second gratifié C, enfant adopté en la forme simple, issu de la première union de sa seconde épouse. Le jeu de la disposition graduelle ou résiduelle permet la transmission au second gratifié en application du régime fiscal en ligne directe dont bénéficie C du chef de son parent adoptif. En l'absence de stipulation graduelle ou résiduelle, la transmission du même actif au profit de C dans la succession de B serait assujettie aux droits de mutation à titre gratuit en ligne collatérale7. 14 - Si les donations-partages relèvent majoritairement des droits de mutation à titre gratuit, le droit de partage ne s'efface pas pour autant systématiquement. a) Usufruit réversible 15 - Fiscalité de la réversion. – Bien qu'elle constitue une donation à terme de biens présents 8, la stipulation d'une réversion d'usufruit relève des droits de mutation par décès (CGI, art. 796-0 quater). Par conséquent, le conjoint survivant ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité sera exonéré des droits dus au titre de l'usufruit dont il bénéficie par suite de la réversion. En revanche, lorsque le bénéficiaire de la réversion est un tiers ou un concubin, il faudra procéder à la liquidation des droits de succession. Pour ce faire, il est tenu compte du lien existant entre le constituant de l'usufruit et le nouvel usufruitier, le second tenant ses droits du premier 9. Les droits sont calculés au jour de l'ouverture de la réversion d'usufruit, c'est-à-dire à la date du décès de l'usufruitier précédent 10, tant en ce qui concerne la valeur des biens que pour la détermination de l'âge de l'usufruitier et le tarif des droits applicables 11. b) Usufruit successif et donation-partage transgénérationnelle incorporative 16 - Usufruit per translationem ou per retentionem. – En présence d'une donation-partage transgénérationnelle, l'incorporation de donations antérieures par la génération intermédiaire doit être traitée avec vigilance, notamment lorsque celle-ci souhaite bénéficier, à terme, d'un usufruit sur les biens incorporés. Deux schémas rédactionnels peuvent être envisagés : ou l'usufruit est constitué au profit de l'enfant de la génération intermédiaire auquel le droit est transféré (usufruit per translationem), ou bien l'usufruit est directement retenu par ce dernier qui incorpore alors partiellement sa donation (usufruit per retentionem). 17 - Fiscalité de l'usufruit successif. –Dans l'hypothèse d'un usufruit per translationem, la première génération recouvrant un instant de raison ses droits de propriétaire, pourra constituer un usufruit successif sur la tête de la génération intermédiaire. Comme précédemment, les droits de mutation par décès à raison de l'ouverture de l'usufruit successif seront liquidés selon le lien de parenté entre le constituant de l'usufruit et le bénéficiaire de l'usufruit successif, à la date du décès 12. Cette rédaction peut apparaître d'autant plus préjudiciable d'un point de vue fiscal, lorsque le constituant et le bénéficiaire de l'usufruit successif sont étrangers l'un pour l'autre ; tel est le cas du conjoint d'un enfant de la génération intermédiaire. Par conséquent, la stipulation d'un usufruit per retentionem reste, en tout état de cause, conseillée. L'enfant de la génération intermédiaire incorpore partiellement les biens donnés en retenant un usufruit successif à son profit. Lors de son ouverture, l'usufruit ne génèrerait aucune taxation, faute de transmission13. Enfin, l'enfant pourra tout à fait retenir cet usufruit à son profit, tout en constituant un 5. BOI-ENR-DMTG-20-20-10, 12 sept. 2012, § 130. 6. BOI-ENR-DMTG-10-20-50-10, 12 sept. 2012, § 110. 7. BOI-ENR-DMTG-10-50-80, 30 juin 2022, § 160 : l'administration fiscale admet à titre de faveur que soient appliqués, entre l'adopté et l'enfant de l'adoptant, les droits de mutation à titre gratuit en ligne collatérale. 8. Cass. 1re civ., 21 oct. 1997, n° 95-19.759 : Bull. civ. I, n° 291. 9. BOI-ENR-DMTG-10-20-50-40, 12 sept. 2012, § 1. 10. BOI-ENR-DMTG-10-20-50-40, 12 sept. 2012, § 10. 11. BOI-ENR-DMTG-10-20-50-40, 12 sept. 2012, § 60. 12. Rép. min. n° 115883 : JOAN 8 nov. 2011, p. 11832, J. Ceccaldi-Raynaud, reprise au BOI-ENR-DMTG-20-20-10, 12 sept. 2012, § 180. 13. BOI-ENR-DMTG-20-20-10, 12 sept. 2012, § 210 a contrario. Toutefois, la généralité des termes de la réponse ministérielle du 8 novembre 2011, invite 45 ACTES PRATIQUES & STRATÉGIE PATRIMONIALE - N° 3 - JUILLET-AOÛT-SEPTEMBRE 2023 - © LEXISNEXISSA Dossier

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