imputation subsidiaire pouvant éventuellement avoir lieu sur l'usufruit de la quotité disponible ordinaire. Dans l'hypothèse où le défunt aurait également gratifié un tiers en usufruit ou en pleine propriété, un concours de quotités disponibles aura lieu sur l'usufruit de la quotité disponible, entraînant une réduction proportionnelle des deux libéralités concernées 42. 25 - La réversion de quasi-usufruit. –Par ailleurs, la réversion d'usufruit peut se muer automatiquement en quasi-usufruit, en présence d'une donation-partage ayant pour objet des sommes d'argent. Pour quel montant et à quel moment les nus-propriétaires pourront-ils faire valoir leur créance de restitution lors des opérations de liquidation ? Au décès du premier quasi-usufruitier, les nus-propriétaires ne pourront se prévaloir d'aucun droit ; le quasi-usufruit de second rang va s'ouvrir sans que l'usufruit premier n'ait pu s'éteindre lui-même. Si le premier quasi-usufruitier laisse une assiette moindre au survivant, ce dernier pourra faire valoir une créance envers la succession du premier ayant dépensé les deniers. Ce n'est qu'au décès du second quasi-usufruitier que les enfants nus-propriétaires pourront se prévaloir de leur créance de restitution, devant correspondre à l'assiette originaire du quasi-usufruit 43. 26 - Fiscalement, la question se pose de savoir si les nus-propriétaires pourraient également se prévaloir d'une restitution relative à un trop versé de droits de donation (CGI, art. 1965 B) ? Si toutes les conditions sont réunies, ce droit à restitution devrait pouvoir s'exercer dans ces circonstances, sous réserve que le donateur n'ait pas pris en charge les droits de donation, conformément à une récente réponse ministérielle contestable et contestée44. Même si l'Administration reste taisante sur ce point, rien ne fait obstacle à ce que les nus-propriétaires puissent obtenir une restitution sur la partie excédentaire réglée, eu égard à la valeur de leur nue-propriété actualisée, en présence d'un second quasi-usufruitier plus jeune45. 27 - L'usufruit successif non encore ouvert. –Encore peu abordée, cette hypothèse se rencontrera toutefois fréquemment notamment en présence d'une donation-partage transgénérationnelle ; le donateur (G1) ayant réservé un usufruit au profit de son conjoint survivant et stipulé un usufruit successif sur la tête de la génération intermédiaire (G2). Au décès du donateur, l'usufruit du conjoint survivant s'ouvre, alors que celui de la génération intermédiaire reste en germe ; doit-il pour autant être absent des opérations de liquidation ? Si l'on s'en tient à un raisonnement purement fiscal, seuls sont pris en compte les usufruits ouverts. Civilement, lorsque l'usufruit est éteint au jour du décès, il n'en est pas tenu compte ; qu'en est-il lorsqu'il n'a pas encore eu l'occasion de prendre effet ? En matière de vente immobilière, l'usufruitier successif dont le droit n'aurait pas encore pris effet bénéficie pourtant d'un choix : renoncer à ce droit, qui lui est acquis, ou percevoir une partie du prix de vente. En ce dernier cas, les usufruits doivent être évalués : le principe est de déduire la valeur de l'usufruit le plus faible (bien souvent l'usufruit premier), de celle correspondant à l'usufruit le plus fort (l'usufruit successif non encore ouvert). Lors d'une vente, l'usufruit successif, même non ouvert, revêt donc une valeur, il semble ainsi difficile d'en faire totalement abstraction lors des opérations de liquidation. Le résultat reste toutefois paradoxal ; la réunion fictive d'un droit est opérée, alors même que celui-ci est susceptible de ne jamais prendre effet 46. 28 - L'usufruit temporaire. –Une distinction est d'ores et déjà à opérer ; entre l'usufruit temporaire ayant pris fin et celui qui serait encore ouvert au jour du décès du donateur. Dans la première hypothèse, il semble possible de soutenir que la donation d'usufruit temporaire ne fera pas l'objet d'une quelconque valorisation au titre de la liquidation, la pleine propriété étant reconstituée sur la tête des donataires en nue-propriété ou au sein des biens existants. Il serait toutefois possible de soutenir qu'une telle donation devrait être prise en compte dans les opérations liquidatives compte tenu des bénéfices que le donataire, même temporaire, aurait pu en retirer. Si cette solution pourrait paraître plus équitable, elle reste difficile à mettre en œuvre en pratique, notamment en ce qui concerne la valorisation des avantages effectivement perçus par le donataire. Maintenant, si la durée fixée pour l'usufruit n'est pas écoulée au jour du décès, la solution est acquise ; cette donation devra être valorisée lors du règlement de la succession et traitée conformément aux préceptes de l'imputation en assiette47. 29 - La renonciation à usufruit. –Enfin, le donateur s'étant ab initioréservé l'usufruit des biens donnés dans l'acte de donationpartage, peut souhaiter y renoncer, dans un second temps. Les implications civiles de la renonciation à usufruit vont alors dériver directement de sa qualification. En premier lieu, cette renonciation peut être dénuée de toute intention libérale vis-à-vis du nu-propriétaire et consister en une simple manifestation unilatérale de volonté ; l'usufruitier peut être motivé par la volonté de se défaire d'un bien dont les charges sont trop conséquentes, ou en raison d'une mésentente existant avec le nu-propriétaire. D'un point de vue liquidatif, la renonciation à usufruit dite « abdicative »ne sera pas constitutive d'une libéralité48.Ainsi, les donataires gratifiés en nue-propriété réuniront tout simplement le bien pour sa valeur en pleine-propriété au jour de la donation-partage. Bien que la renonciation puisse être postérieure à la donation, rien ne justifierait une réévaluation du bien. 30 - Néanmoins, une telle renonciation a souvent pour effet de reconstituer corrélativement la pleine propriété au profit de nus-propriétaires, détenant la qualité de descendants de l'usufruitier. En raison du lien de parenté, l'intention libérale du renonçant peut-être généralement caractérisée. Partant, une dichotomie sera à opérer au stade la liquidation entre d'une part, la renonciation à usufruit constitutive d'une donation et d'autre part, la donation-partage en nue-propriété l'ayant précédée. Suivant les principes de l'imputation en assiette, la valeur du bien en pleine propriété sera donc à réunir, tant pour la renonciation à usufruit, que pour la donation en nue-propriété. La question est toutefois celle de la valorisation ; la donation en nue-propriété est réunie pour la valeur en pleine propriété au jour de l'acte, mais qu'en est-il de la renonciation à usufruit ? Faut-il prendre en compte la valeur en pleine propriété du bien au jour de la donation-partage, au jour de la renonciation ou bien prévoir une réévaluation au jour du décès ?ê 42. Pour une illustration : V. Mémento Lefebvre Successions Libéralités, « Cas pratiques », 2023, n° 77050 et s. 43. H. Leyrat, Les aspects civils et fiscaux du quasi-usufruit successif : Defrénois, 2023, n° 1, p. 36 et s. 44. Rép. min. n° 26892 : JOAN 2 juin 2020, p. 3863. 45. C. Blanchard et M. Iwanesko, Quasi-usufruit, transmission et réversibilité : Actes prat. strat. patrimoniale 2015, n° 3, dossier 21. 46. La difficulté semble résulter de qualification même de l'usufruit successif, considéré comme une donation dont le droit est déjà né. 47. Pour l'imputation, il convient de valoriser le bien donné en pleine propriété ; en cas de réduction, l’indemnité sera calculée après capitalisation de l’excédent réductible (CGI, art. 669 II). 48. « La renonciation à usufruit, quand elle est faite purement et simplement, sans indication ni exclusion d'aucun des nus-propriétaires, ne constitue ni une convention synallagmatique, ni une donation entre vifs [...] » : Cass. req., 16 mars 1870 : S. 1870, 1, 281. 42 © LEXISNEXISSA - ACTES PRATIQUES & STRATÉGIE PATRIMONIALE - N° 3 - JUILLET-AOÛT-SEPTEMBRE 2023 Dossier
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