La Semaine Juridique Notariale et Immobiliere

1360 ÉTUDE DOSSIER Page 74 © LEXISNEXIS SA - LA SEMAINE JURIDIQUE - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 51-52 - 24 DÉCEMBRE 2021 20 - Clause de non-concurrence. – Pour être valable, une clause de non-concurrence doit être justifiée par un intérêt légitime, et limitée à la fois dans le temps, dans l’espace et quant à son objet. La condition liée à l’espace ne peut pas être remplie puisque le fonds de commerce électronique ne connaît pas de frontière. Il convient donc de substituer aux clauses classiques de non- concurrence ou de non-rétablissement géographique certaines interdictions temporaires, de ne pas faire, liées aux éléments cédés (C. com., art. L. 141-12) . Une clause qui interdit purement et simplement d’exercer une ac- tivité concurrente sur internet sans limitation, pourrait être jugée illicite car toute clause de non-concurrence doit être proportion- née au risque allégué. 21 - Publicité. – Les dispositions d’ordre public concernant la pu- blicité de fonds de commerce dans un journal habilité à recevoir les annonces légales doivent être aménagées. Comment en effet déterminer l’arrondissement ou le départe- ment dans lequel le fonds est exploité pour un commerce électro- nique développé sur internet qui ne connaît pas de frontière ? Il convient, en l’absence de règle propre à la matière, d’emprunter les dispositions prévues pour les fonds forains. Les mesures de publi- cité devront s’effectuer au lieu où le cédant est inscrit au Registre du commerce et des sociétés 24 . CONSEIL PRATIQUE ➜ De plus certains auteurs préconisent de compléter cette publicité par une information sur le site ainsi qu’une dé- marche active pour parfaire l’information des créanciers 25 . B. - Les cessions entre vifs à titre gratuit d’actifs numériques : les donations d’actifs numériques 22 - Avant d’aborder la pratique juridique et fiscale des donations, il convient de revenir brièvement sur les modalités de détention et de transfert des actifs numériques 26 . En matière de cryptomonnaies, le système repose sur un couple : clé privée-clé publique. La clé privée est une signature alphanumérique secrète, soit un chiffre de 256 bits auquel personne d’autre que le titulaire n’est censé avoir accès. Elle est encodée de façon à en condenser l’écri- ture sur cinquante et un caractères 27 et peut être représentée sous forme de QR code. Cette clé est générée de manière aléatoire au 24 P. Stoffel-Munck et G. Decocq, L’avènement du commerce électronique : Gaz. Pal. mai-juin 2009. 25 V. en ce sens, A. Benarab, Vente d’un site E-commerce et cession du fonds de commerce : CGV Experts, 13 août 2012. 26 Pour l’étude du fonctionnement technique des actifs issus de la blockchain : Rapp. 117 e Congrès des notaires de France 2021, Le Numérique, l’Homme et le Droit, Accompagner et sécuriser la révolution digitale, n° 2034 et s. 27 Exemple de clé privée : 5Jd4kDBTJnDmQwLv94gjWheWwsrvmRMG- fLj438BBLdRtw4axSAy . moment de l’acquisition d’un portefeuille de cryptomonnaies. Elle n’intervient pas dans la transaction, elle est le sésame qui donne accès à son portefeuille ( wallet ). Une clé privée sert unique- ment à prouver que vous êtes le détenteur d’une certaine adresse de cryptomonnaies. Celui qui en a le contrôle a tous pouvoirs sur les transactions et les dépenses liées aux fonds sur cette adresse. À partir de la clé privée, une deuxième signature est déduite, appe- lée clé publique. Cette clé publique peut toujours être calculée en partant de la clé privée, tandis que l’inverse est impossible, d’où l’appellation de « cryptographie à clés asymétriques » . La clé publique fait enfin l’objet d’opérations successives de « hachage » dont le résultat, toujours compris entre vingt-sept et trente-quatre caractères 28 , constitue une « adresse » . 23 - Pour détenir des cryptomonnaies, il faudra communiquer son adresse à la personne dont on attend un versement. Celle-ci ini- tiera le transfert en signant, à l’aide de sa clé privée, et la personne qui va les recevoir accepte ce transfert avec sa propre clé privée. C’est parce qu’il sera seul à disposer de cette clé privée, et donc à pouvoir utiliser les cryptomonnaies, que le destinataire en sera devenu « titulaire » . En réalité aucune cryptomonnaie n’est en fait détenue. Dans le portefeuille ne figurent que des clés auxquelles les membres d’un réseau décentralisé reconnaissent le pouvoir d’associer un nombre donné d’unités. 24 - Rappelons que ces clés peuvent être détenues de deux manières : • soit une détention indirecte, par le biais de plateformes de déten- tion et de gestion de cryptomonnaies qui détiennent les comptes de cryptomonnaies de leurs clients. L’accès aux comptes se fait alors sur internet comme on le fait pour une banque classique avec un mot de passe. C’est donc l’intermédiaire qui détient la clé privée. Selon le rapport Landau 29 , le montant des pertes enregis- trées suite aux piratages atteignait, au 30 juin 2018, la somme de 1,2 milliard de dollars ; • soit une détention directe, par le biais de deux types de portefeuilles : – un portefeuille papier dans lequel les clés sont conservées soit sur une simple feuille, soit dans un fichier sur l’ordinateur person- nel du détenteur ou sur une clé USB ; – un portefeuille froid se présentant sous la forme d’un mini-ordi- nateur de la taille d’une clé USB qui, pour fonctionner, devra être raccordé à un ordinateur. Cet appareil va générer les clés privée et publique qui ne seront pas connues de son utilisateur. Différentes unités de cryptomonnaies pourront être conservées dans ce coffre dont l’ouverture se trouve sécurisée par un code numérique. 28 Exemple de clé publique : 1BFW79d584dt2RXDBTsqBjnYeLWtgRjVhk . 29 Rapp. du 4 juill. 2018 au ministre de l’Économie et des Finances sur les crypto- monnaies, J.-P. Landau, sous-gouverneur honoraire de la Banque de France.

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