La Semaine Juridique Notariale et Immobiliere
ÉTUDE DOSSIER 1358 Page 63 LA SEMAINE JURIDIQUE - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 51-52 - 24 DÉCEMBRE 2021 - © LEXISNEXIS SA 25 - L’affectation en garantie hypothécaire. – Droit réel qui assure la conservation et le recouvrement d’une créance, l’hypothèque conventionnelle nécessite naturellement le consentement du conjoint non propriétaire 23 . En effet sans l’assimiler à la vente elle constitue pourtant un acte de disposition tombant sous le coup de l’article 215. 26 - La promesse d’hypothèque. – En réalité, la promesse d’affec- tation hypothécaire ne peut constituer un acte de disposition. Il ne s’agit en effet que d’une obligation de faire dont on peut tirer toutes les conséquences. La promesse d’hypothèque est, de jure , hors champ d’application. 27 - Quant au cautionnement hypothécaire. – L’engagement faus- sement appelé caution hypothécaire n’est pas en soi un acte de disposition au sens de l’article 215, alinéa 3, du Code civil 24 . Plus précisément le cautionnement peut être valablement consenti en l’absence du consentement du conjoint non propriétaire, mais l’affectation hypothécaire qui lui est adjoint, ne peut lui se conce- voir sans le consentement de l’époux. 28 - L’hypothèque judiciaire. – Quant à l’hypothèque judiciaire, elle ne suit pas le même régime. S’agissant de l’exercice d’une pré- rogative légale accordée à un créancier, elle ne s’apparente pas à un acte de disposition au sens de l’alinéa 3 de l’article 215 25 . 3. L’expression du consentement, et à défaut la sanction applicable 29 - À quel moment et sous quelle forme l’expression de la volonté de l’époux doit-elle être formalisée ? A. - L’expression du consentement 30 - Dans une matière régie par la cogestion, l’expression de la volonté de l’époux attire nécessairement l’œil du praticien. La loi ne précise pas quel formalisme adopter. La Cour de cassation a eu l’occasion de se prononcer à maintes reprises sur le sujet, nous avons par conséquent quelques pistes de réponses. En premier lieu, il n’est absolument pas nécessaire que les deux époux soient présents au moment de l’acte. Le consentement peut s’exprimer préalablement ou a posteriori . Ensuite, il n’est pas exigé que le consentement soit écrit. Certes peu commode pour le praticien qui préférera l’obtenir, il suf- fit qu’il soit certain. Reprenons notre exemple du mandat : si le conjoint a valablement signé le mandat de vente, le consentement doit être considéré comme étant certain. Dans ces conditions, l’acceptation de l’offre adressée au public par un acquéreur rend la vente parfaite, l’acte peut être signé par le seul époux propriétaire qu’il s’agisse de l’avant contrat ou de l’acte définitif. 23 Cass. 1 re civ., 6 avr. 1994, n° 92-15.000 : JurisData n° 1994-001184. 24 Cass. 1 re civ., 17 déc. 1991, n° 90-11.908 : JurisData n° 1991-003361. 25 Cass. 1 re civ., 8 janv. 1985, n° 83-15.647 : JurisData n° 1985-700077. Est-il envisageable de se contenter du consentement donné verba- lement, par exemple, lors d’une réquisition par visio-conférence ? Dans l’absolu, il convient de répondre positivement. ATTENTION ➜ Cependant, le praticien doit être extrêmement vigi- lant. La Cour de cassation considère que le consentement exigé du conjoint porte non seulement sur le principe même de la vente, mais il doit en outre porter sur ses conditions 26 , notamment le prix. 31 - Consentement induit. – Le consentement peut également être induit. Dans le cadre d’une procédure de surendettement nous savons que la commission ou le juge ne peut pas procéder à la vente forcée des biens, laquelle ne peut intervenir que sur initiative des ou du débiteur(s) dans le délai imparti par le plan. Il s’agit bien là d’une vente volontaire, laquelle subordonne l’exécution du plan. Ainsi, lorsque le dossier a été présenté par les deux époux, le conjoint non propriétaire ne peut plus s’opposer à la vente sur le fondement de l’article 215. Évidemment, un conjoint qui se- rait extérieur à la procédure, c’est-à-dire lorsque le dossier a été présenté par un seul, bénéficie de la protection accordée par cet article. 32 - Les parades envisageables en cas de refus du conjoint. – La technique du porte-fort est parfois envisagée par certains époux et négociateurs immobiliers pour contourner le consentement im- médiat du conjoint. Dans cette convention par laquelle une per- sonne s’engage envers une autre à obtenir le consentement d’une autre personne à un acte, tout en acceptant le risque, celui qui se porte fort s’expose à titre personnel à une indemnité pour le cas où le consentement n’est pas obtenu 27 . Seulement, l’idée d’échap- per aux exigences de la cogestion par ce biais est risqué. Peut-on penser raisonnablement que même si le consentement fait défaut, la vente produise tout de même ses effets à l’égard des acquéreurs ? La Cour de cassation n’est pas de cet avis 28 . Elle a déclaré la vente nulle y compris dans les rapports du mari avec ses cocontrac- tants. Comme l’a souligné Bernard Vareille, la cour ne permet pas « d’enfermer le conjoint dans un mauvais dilemme : exécuter la promesse volens nolens (bon gré mal gré), ou subir les conséquences financières de l’inexécution » . 33 - Lorsque le conjoint refuse de donner son consentement, il existe peut-être une autre solution : recourir au régime primaire. L’article 217 du Code civil permet en effet à un époux d’être auto- risé judiciairement à passer seul un tel acte si le refus de l’autre n’est pas justifié par l’intérêt de la famille. Cependant la décision ne sera favorable que dans des hypothèses justifiant l’intérêt de la famille, et non l’intérêt du seul époux. À titre d’exemple, la demande fon- 26 Cass. 1 re civ., 16 juill. 1985, n° 83-17.393 : JurisData n° 1985-701871 ; Bull. civ. I, n° 223. 27 C. civ., art. 1204. – G. Cornu (dir.), Vocabulaire juridique, V° Porte-fort. 28 Cass. com., 16 oct. 1996. – B. Vareille, RTD civ. 1997, p. 990.
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