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83 La deuxième option, probablement cumulative, est aussi d’assister à de pos- sibles retournements de dernière minute pour combler un déficit insoutenable et le risque de voir apparaître des propositions sous forme d’amendements dont les effets sur les entreprises ne seraient pas toujours mesurés. On note déjà que les acteurs les plus en vue lors de la crise sont principalement le di- gital (avec une taxe européenne relancée) ou la distribution (même si celui-ci n’est pas uniformément en croissance). La cible devrait plutôt être les grands groupes, mais la notion de grand groupe descend parfois jusque 750M de CA, rapidement atteint dans des secteurs à faible marge et chiffre d’affaires important. On peut aussi anticiper des dispositifs antidélocalisation qui ont l’avantage d’être budgétairement rentables et politiquement porteurs. La probabilité de voir cette option mise en place augmentera si les prévisions de croissance ne sont pas atteintes, mettant en évidence l’incapacité à supporter le niveau de la dette. C. - La modification de la fiscalité des grands groupes (et des moins grands), source d’incertitudes organisationnelles Les annonces récentes au sein du G7 10 sous la pression américaine et de la réaction de l’OCDE ne peuvent pas être ignorées, même si elles présentent de grandes incertitudes pour leur approbation tant au niveau américain qu’au ni- veau européen. On voit cependant que les obstacles diminuent avec le temps. On notera plusieurs points d’attention. En premier lieu, les seuils sont suffisamment faibles pour le pilier 2 relatif à l’impôt minimum pour que les ETIs d’une certaine taille s’y intéressent. En second lieu, les délais connus à ce jour prévoient une application peut- être en 2023 ce qui laisse peu de temps entre la date de connaissance de plus d’éléments techniques en octobre prochain et la date de mise en place. On peut imaginer qu’avec la présidence européenne de la France, le volet européen soit clarifié seconde partie de 2022. Cela laisserait 6 mois pour une application en 2023 ce qui est à la fois irréaliste et oblige à anticiper sans avoir la décision définitive. Notre approche de ce sujet serait d’anticiper des ressources combinées fonc- tion fiscale/fonction consolidation. Sans être devin, on peut en effet prévoir que l’harmonisation recherchée sur le taux minimum (Pillar 1 et Pillar 2) ne pourra se faire effectivement que si des bases communes consolidées sont utilisées. On aurait donc fin 2021 une première estimation de la charge éven- tuelle et mi 2022 une mise en place d’un projet pour être en marche en 2023. Le déroulement exact sera rythmé par des étapes nécessaires déjà connues qu’il faut suivre attentivement. 10. Fiscalité internationale et droit de l’UE : JCP N 2021, n° 24, act. 631. 11. CBCR public : les législateurs européens parviennent à un accord : Dr. fisc. 2021, n° 23, act. 346. 12. CGI, art. 223 quinquies C. 13. Com (2021) 251 final Communication from the Commission to the European Parliament and the Council Business Taxation for the 21st Century. 14. Vodaphone tax strategy - https :/ /www.vodafone.com/content/dam/vodcom/sustainability/pdfs/tax-strategy-2018.pdf D. - L’augmentation des coûts liés à la transparence La stratégie fiscale c’est aussi de mettre en place des budgets et les res- sources pour répondre aux priorités identifiées. L’évolution actuelle nous semble permettre de prévoir une augmentation des coûts en matière fiscale, en particulier en matière de compliance. Il nous semble que la période où les obligations existantes ont été peu ou pas exploi- tées est révolue, l’objectif des autorités de tous les pays étant de traiter de manière mécanisée les informations à disposition. À titre d’illustration on notera que la décision européenne relative au reporting public par pays 11 entraînera des coûts supplémentaires même si opération- nellement le process devrait être inclus dans celui déjà en place pour le CBCR dit fiscal 12 . La question qui semble désormais sur la table est celle de la « substance » qui revient au-devant de la scène avec la consultation organisée par les autorités européennes 13 . Sans anticiper ce qui va ressortir de la consultation en cours, il nous semble essentiel d’appliquer certains principes dès à présent : limiter l’utilisation de structures sans substance (en particulier lorsque le groupe ne dispose pas d’autres structures dans le même État), s’interroger sur l’effet d’un manque de substance sur un autre dispositif (résidence, établissement stable, bénéficiaire effectif)… Il faut privilégier les structures qui présentent un avantage non fiscal réel quantifiable. Cette approche, qui devrait déjà être celle adoptée par des groupes de tailles significatives, va devoir être décli- née avec discernement pour les ETIs, entraînant l’augmentation des coûts de structure. Une autre évolution, qui devrait aboutir à court terme à une augmentation des coûts et qui se matérialise désormais, est la nécessité d’être capable de com- muniquer sa stratégie fiscale avec les marchés et les organisations représen- tatives des salariés. Ceci semble vrai pour les balbutiements de publications des politiques fiscales pour lesquelles nos voisins ont déjà une avance cer- taine 14 ou pour la capacité à échanger avec les organisations représentatives du personnel afin d’éviter un blocage et une communication externe négative pour l’entreprise. Dans ce domaine, comme dans les autres, le changement c’est maintenant. 3. Le décloisonnement A. – Rompre avec les « silos » vers une stratégie « transversale et cosmopolite » De nombreuses organisations, y compris des cabinets de conseil, analysent les sujets de manière verticale en « silo ». Ainsi, les sujets sont répartis par impôt, en distinguant les impôts qui relèvent naturellement de la « sphère cor- porate » (impôt sur les profits, TVA et imposition locale…) de ceux qui relèvent d’autres « sphères ». Cette approche est, selon nous, révolue. Dans le cabinet c’est parfois le système de partage des revenus qui favorise la vision en silo.

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