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81 nière. Elle est aussi de distinguer approches possibles et approches contraires aux mouvements « systémiques » de marchés. Enfin, il ne faudrait pas oublier que l’information est aussi largement disponible publiquement y compris à l’étranger où la pluralité des opinions publiées est souvent plus grande que dans notre pays. Les sujets techniques se mondialisent, les stratégies fiscales aussi. Le tri entre « l’important » et « l’accessoire » se fera selon une méthode ob- jective de probabilité avec laquelle les financiers sont familiers, que ce soit dans les normes IFRS ou les normes USGAAP et le célèbre « more likely than not ». Il s’agit donc d’identifier au sein des évolutions anticipées des pratiques fiscales celles qui ont une probabilité suffisante de réalisation pour ne pas les ignorer. La recherche d’un langage commun avec les financiers nous semble un objectif structurant essentiel et sortir d’une analyse subjective est désor- mais la norme internationale dans ce domaine. Le fiscaliste aura ainsi intérêt à adopter un vocabulaire normé lorsqu’il souhaite communiquer ses recom- mandations, ne serait-ce que parce que les biais culturels peuvent parfois brouiller le message. Il ne faut jamais oublier que « le langage est source de malentendu » (Antoine de Saint-Exupéry) et ceci encore plus lorsque les échanges ont lieu dans une langue dont on maîtrise souvent la mécanique, mais dont il est aisé de se laisser piéger par des connaissances superficielles de la culture de l’orateur. L’analyse doit donc d’être simplifiée et objectivée, limitant les jugements de valeur subjectifs au minimum. À l’instar d’autres prévisions d’analystes de marchés, il est essentiel de déterminer les hypothèses de travail et parfois démythifier les informations dont les directions financières peuvent disposer, souvent communiquées par des non-fiscalistes. Le rôle du fiscaliste est d’ob- jectiver le débat et de proposer des actions avec un calendrier, des contraintes et le moyen de les surmonter. Il ne s’agit pas de ne pas émettre de jugement, il s’agit d’émettre un jugement objectif quitte à ajuster mécaniquement la stratégie si les faits sont invalidés. Dans la période récente, le facteur temporel a pris en outre une importance critique. Les grands changements fiscaux étant motivés par des agendas po- litiques, la capacité d’accélération ou de ralentissement est intrinsèquement dépendante de l’évolution des agendas politiques (l’exemple des discussions actuelles sur la réforme de la fiscalité internationale constitue un exemple symptomatique de cette évolution qui est là pour durer). Pour la France, par exemple, les élections présidentielles et la présidence de l’Europe en 2022 sont deux événements dont on peut penser objectivement qu’ils vont favoriser les évolutions du régime fiscal mondial. Le sujet n’est pas une question qui se limiterait à une estimation de la date d’entrée en vigueur qui constitue déjà parfois une complexité qui nécessite une connaissance profonde des mécanismes législatifs français et étrangers. C’est aussi une question relative à la maîtrise technique des équipes internes et leur capacité à « décrypter en amont » les mouvements de marché. C’est enfin, la capacité à déterminer l’implication opérationnelle des évolutions an- ticipées qui peuvent être dépendantes de la date prévue d’entrée en vigueur mais n’y sont pas automatiquement attachées. L’allocation des ressources est donc, après l’impact financier, un sujet essentiel. La ressource n’est pas 3. R. Coin, Versements au profit de personnes dans des pays à fiscalité privilégiée (CGI, art. 238 A) : JCl. Fiscal international Fasc. 3720 : Répression de l’évasion fiscale internationale. extensible, l’anticipation permet de lisser la demande dans le temps en fonc- tion des priorités qui sont déterminées par la mise en place de la stratégie. Si on prend l’exemple de la mise en place d’un impôt minimum et même si des éléments seront connus en octobre, l’annonce pour une mise en place souhai- tée en 2023, permet de conclure que les premières estimations quantitatives doivent être faites en lien avec la clôture des comptes consolidés 2021. La modification effective des process est probablement un exercice plutôt mi- 2022. L’exercice 2022 pourrait, en outre, être un exercice destiné à mettre en place des stratégies pour éviter ou retarder la mise en place de ce nouveau dispositif si cela est opérationnellement viable. Dernier élément essentiel évoqué brièvement : le quantum . C’est un élément que les conseils externes ne sont pas toujours en mesure d’aider à déterminer. Il faut ici aussi utiliser la méthode des hypothèses probables. Si nous prenons l’exemple des évolutions sur la fiscalité internationale par exemple, il est assez compliqué de déterminer un montant précis alors que la méthode de calcul de la base n’est pas finalisée. On peut toutefois essayer de déterminer un montant sur le fondement des comptes consolidés pour débuter l’analyse ce qui implique de disposer de ce support en amont de la présentation de la stratégie fiscale. On peut aussi analyser la fiscalité effective des entités étrangères du groupe qui rendent des services à l’instar de ce qui est fait en matière d’article 238 A du CGI pour les versements effectués au profit d’entités soumises à un régime fiscal privilégié 3 . On notera qu’en pra- tique, utiliser au maximum les process et analyses déjà effectuées doit être la priorité surtout des ETIs. C’est de la qualité et de l’objectivité de l’analyse que dépend la facilité de la discussion avec les directions financières, y compris le cas échéant d’une demande de ressources supplémentaires. Il sera attendu de l’équipe fiscale de proposer un niveau d’analyse au moins au niveau du marché et probable- ment au-delà pour apporter de la compétitivité à l’organisation. Connaître la position des autres acteurs de marché est donc aussi une nécessité. On notera enfin que cet exercice dépend également de la capacité des orga- nisations à rendre accessible les données fiscales financières et « faire tour- ner » des modèles que seule la mise en place de process maîtrisés permettra d’atteindre. 2. La hiérarchisation des certitudes pour créer une analyse croisée opérationnelle et stratégique Il sera nécessaire d’identifier des critères de classification des fondements de la stratégie fiscale à venir pour objectiver et communiquer les choix et recommandations. Il s’agit de critères qualitatifs destinés à appréhender les évolutions et des critères quantitatifs afin de ne se concentrer que sur les éléments essentiels. Les deux catégories doivent être fondées sur des critères objectifs. Nous pourrions distinguer par exemple : - les éléments déjà identifiés mais dont l’influence va croître pour devenir prioritaire ; - les évolutions probables nouvelles dont la communication va devoir être gérée entre aujourd’hui et la clôture ;
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