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CONTRATS ET PRODUITS FINANCIERS 38 RG AMF, art. 212-43 et s.) ;3° en dessous de 5 millions, elle pourrait relever soit du droit national en exemption de prospectus soit du régime européen du financement participatif, selon les conditions dans lesquelles elle est réalisée et le type d'intermédiaire qui y concourt. On pourrait même imaginer – en théorie du moins – le maintien d'une réglementation nationale du financement participatif pour les seules offres comprises entre 5 et 8 millions d'euros, lesquelles demeureraient de la compétence des CIP de droit français et donneraient toujours lieu à un « document d'information règlementaire synthétique » (V. RG AMF, art. 217-1 et s.). 21. - L’adoption d’une législation européenne devrait en tout cas favoriser les offres transfrontières. Certes, le site Internet des plateformes est a prio- ri accessible depuis le monde entier ; mais à elle seule, cette circonstance n’autorise pas l’émetteur à cibler délibérément les investisseurs de différents pays. L’exemption au règlement Prospectus sur laquelle prospèrent les offres de crowdfunding de droit français n’a manifestement pas été pensée pour les offres transfrontières 43 , et le « document d’information réglementaire synthé- tique » , dont la traduction n’est pas prévue, ne fait l’objet d’aucune reconnais- sance particulière. De son côté, le règlement (UE) 2020/1503 du 7 octobre 2020 met en place de manière explicite un passeport « acteur » au béné- fice des PSFP, mais peut-être aussi un passeport « produit » au bénéfice des porteurs de projets 44 : il a pour objectif déclaré de faciliter « le financement transfrontalier des entrepreneurs » 45 , ce qui implique la possibilité pour ces derniers de recourir aux services d’un prestataire originaire d’un autre État membre, mais également d’offrir leurs titres à « des investisseurs d'États membres différents » 46 . La « fiche d'information clé sur l'investissement » , dont le contenu et la présentation sont uniformisés dans toute l’Union, doit d’ailleurs être fournie dans la langue officielle de chaque État au sein duquel l’offre est promue 47 , ce qui n’est pas sans évoquer le « régime linguistique » du prospectus, reconnu dans toute l’Union sous réserve que son résumé soit établi dans la langue de chaque État d’accueil où l’offre est faite 48 . 22. - On constate enfin une grande souplesse des textes quant au type d’ins- trument pouvant être offert. Le droit français manifestait sur ce point une nette tendance à l’élargissement : initialement cantonnées aux obligations à taux fixe et aux actions ordinaires, les offres de financement participatif se sont ensuite ouvertes aux actions de préférence, aux titres participatifs et aux obligations convertibles en action 49 . Et encore ces limitations ne s’atta- chaient-elles qu’au statut de CIP, de sorte que les plateformes exploitées par 43. L’article 3.1 pose comme condition à l’exemption le fait que « ces offres ne fassent pas l’objet d’une notification conformément à l’article 25 », lequel article régit la notification aux autorités de l’État d’accueil en cas d’offre transfrontière. 44. Comp. R. Gaspard, thèse préc., n° 292 et s., qui estime plus juste de parler de passeport « prestataire » et de passeport « émetteur ». 45. PE et Cons. UE, règl. (UE) 2020/1503, consid. 7. 46. PE et Cons. UE, règl. (UE) 2020/1503, consid. 33. 47. PE et Cons. UE, règl. (UE) 2020/1503, art. 23, 3. 48. PE et Cons. UE, règl. (UE) 2017/1129, art. 27. – Le règlement adopte tout de même une logique particulière : il n’appréhende pas la fiche d’information principalement comme un élément de l’offre faite par l’émetteur, mais plutôt comme un aspect du service rendu par le prestataire (V. cons. 51 et s.). 49. D. n° 2019-1097, 28 oct. 2019, modifiant les dispositions relatives aux offres au public de titres : JO 30 oct. 2019, texte n° 9. – C. mon. fin., art. D. 547-1. 50. M. Buchberger et Th. Granier, Les titres financiers portant l’investissement, in Le cadre juridique du crowdfunding, (dir) A.-V. Le Fur : SLC 2015, p. 129, spéc. p. 134. 51. V. n° 16. 52. P. Pailler, La distinction des tokens et des titres financiers : RD bancaire et fin. 2020, dossier 10. – V. M. Julienne, Les actifs numériques entre droit et technologie : BJB 2020, n° 1, p. 64, n° 15. 53. RG AMF, art. 325-51 et 325-52. 54. PE et Cons. UE, règl. (UE) 2020/1503, art. 23, 6, c, al. 5. 55. PE et Cons. UE, règl. (UE) 2020/1503, art. 2, 1, n. – Ce qui paraît exclure les parts de sociétés coopératives, dont la cession est soumise à « l’approbation » de l’assemblée générale, des administrateurs ou des gérants (L. n° 47-1775, 10 sept. 1947, art. 11 portant statut de la coopération : JO 11 sept. 1947). 56. PE et Cons. UE, règl. (UE) 2020/1503, art. 25. 57. PE et Cons. UE, règl. (UE) 2020/1503, art. 23, 2. 58. PE et Cons. UE, règl. (UE) 2020/1503, art. 25, 3, b. – Il a pu être observé, de la même manière, que la standardisation des prêts immobiliers tend à tout autant à assurer la sécurité du crédit qu’à en faciliter la mobilisation, V. J.-M. Moulin, La financiarisation du crédit hypothécaire par la directive 2014/17/UE : RD bancaire et fin. 2015, dossier 25, n° 44 et s. des PSI n’y étaient pas soumises 50 . Le règlement vise quant à lui les « valeurs mobilières » sans restriction, ce qui devrait permettre aux PSFP de placer une gamme étendue d’instruments et illustre, une nouvelle fois, l’alignement de ce statut sur celui des entreprises d’investissement. Notons qu’il sera possible de proposer des titres enregistrés en blockchain mais non des jetons, qui relèvent d’une autre législation 51 . La distinction des deux catégories n’est pas toujours aisée 52 , mais la qualification d’instrument financier devrait s’imposer sans difficulté pour l’immense majorité des titres proposés qui confèrent des droits (financiers et politiques) tout à fait classiques. B. - Le marché secondaire 23. - Tout investissement expose au danger d’une « perte de capital » , d’une « défaillance » de l’émetteur ou d’un « défaut » du porteur de projet. Mais à ce risque de contrepartie, le financement participatif ajoute l’ « illiquidité » des investissements, dont il peut être difficile de se défaire le moment venu. Cette éventualité doit être portée à l’attention des clients, en droit français 53 comme européen 54 , mais celui-ci va plus loin, et cherche par divers moyens à réduire ce risque. 24. - Ainsi, parce que « la transférabilité est importante pour garantir aux investisseurs la possibilité de sortir de leur investissement » , le règlement (UE) 2020/1503 n’admet que les instruments aisément cessibles, à savoir les valeurs mobilières et les parts de société à responsabilité limitée « ne faisant pas l'objet de restrictions qui les empêcheraient effectivement d'être transférées » 55 . Le règlement (UE) 2020/1503 invite encore les PSFP à mettre en place un « tableau d'affichage » permettant à leurs clients « d'annoncer leur intérêt pour l'achat et la vente » d’actifs 56 . Cet ersatz de bourse pren- drait du reste avantageusement appui sur le « document d'information clés sur l'investissement » qui doit impérativement accompagner chaque levée de fonds : car si sa vocation première est d’être présenté aux investisseurs ini- tiaux 57 , ces derniers devront à leur tour le « mettre à disposition » d’éventuels acquéreurs 58 . 25. - Fidèle à sa vision unitaire du financement participatif, le règlement (UE) 2020/1503 envisage ce tableau d’affichage pour les valeurs mobilières aussi bien que pour les prêts. Le risque d’illiquidité concerne pourtant au premier chef les titres dépourvus d’échéance, et non les créances de remboursement d’un crédit, généralement de courte durée et amortissables ; et plusieurs élé-

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